Que d’eau, que d’eau ! La veille, la soirée du Festival consacrée aux Arts Florissants et à l’oratorio de Haendel Il Trionfo del Tiempo e del Disinganno a dû être annulée pour raisons de sécurité, de violents orages étant prévus en Catalogne espagnole. Le douloureux souvenir des inondations meurtrières de Valence a laissé des traces… C’est d’ailleurs à l’attention des victimes de cette catastrophe qu’Angel Blue débute son récital en l’Eglise du Carmel avec un vibrant Ave Maria de Schubert non prévu au programme. Quelques applaudissements ont-ils à peine le temps de se faire entendre que le pianiste Bryan Wagorn fait raisonner les premières mesures du Ritorna vincitor (Aïda / Verdi). Celui-ci s’enchaînera (?) avec Donde lieta (La Bohème/Puccini) et Depuis le jour (Louise/Charpentier). Le public peut enfin applaudir cette véritable pensionnaire du Metropolitan Opera de New York, un soprano acclamé dans le monde entier aujourd’hui qui faisait, à l’occasion de ce récital, ses débuts dans ce Festival. A vrai dire, l’acoustique de ce lieu n’est pas propice aux voix féminines, pinçant les aigus, rétrécissant les graves. Le médium de la cantatrice a tout loisir cependant de s’épanouir. Nous parvient alors ce timbre chaud et velouté qui en fait la plus grande Bess du moment. Après un très beau Clair de Lune de Claude Debussy suivent Vissi d’arte (Tosca/Puccini) et un extrait de Princesse Czardas (Emmerich Kalman), l’air de Sylva : Heia, heia in den Bergen.

Après l’entr’acte, le répertoire change sensiblement. C’est tout d’abord avec le premier des Three Preludes de George Gershwin que Bryan Wagorn donne le ton. Vont suivre des œuvres d’Harold Arlen, Kurt Weill, Pablo Luna, Ruperto Chapi et des spirituals africains et américains. D’autres larmes vont couler sur le visage de la chanteuse décidément en proie à une vive émotion. Prévu en programme officiel, c’est finalement en bis qu’Angel Blue donnera O mio babbino caro (Gianni Schicchi/Puccini) suivi d’un somptueux Summertime (Porgy and Bess/Gershwin). Le public est sous le charme !
Robert Pénavayre
Photo : Festival Peralada