Que ne fait-on porter comme déshonneur sous le qualificatif de vériste ? S’agit-il simplement de cette école lyrique italienne qui s’épanouit entre la fin du 19ème siècle et le début du siècle suivant ? Le lyrisme vériste consiste-t-il à reproduire dans le chant les malheurs de la vie réelle : cris, pleurs, lamentations, sanglots ?
Toutes ces questions ont trouvé, dans les temps passés et parfois de nos jours encore, des réponses affirmatives. Accompagné par l’Accademia Nazionale Di Santa Cecilia sous la direction superlative d’Antonio Pappano, le ténor allemand Jonas Kaufmann leur inflige ici un démenti cinglant ! Et pourtant, Puccini mis à part, tous les représentants de cette période sont là : Zandonaï, Giordano, Cilea, Mascagni, Boïto, Ponchielli et le rarissimement enregistré Refice (1883-1954).
Mais voilà, le talent, l’intelligence, la musicalité et la parfaite maîtrise d’une technique vocale hors du commun de Jonas Kaufmann concourent ici à revisiter ces airs dont la plupart sont des standards inusables. On les redécouvre avec ce chanteur, dans toute leur finesse et leur densité émotionnelle, une densité qui ne se mesure pas cette fois en décibels. La sombre luminosité de son timbre convient parfaitement à tous ces personnages torturés par la vie. Jonas Kaufmann sait trouver, au détour de telle ou telle note, la douleur de chacun d’eux, la plaie encore vive qui s’y cache ou l’espoir qu’elle contient. Tout simplement somptueux !
