Opéra

La certitude d’un bel artiste

Mikhaïl Timoshenko - Photo : Marine Cessat-Bégler

Fidèles aux rendez-vous que le Capitole donne au public toulousain à 12h30, les fameux « Midi du Capitole » *, les mélomanes de la Ville rose ont à nouveau envahi le vaisseau amiral de la culture toulousaine en ce mitan du 9 novembre 2023. Et comme ils ont eu raison ! Encore une fois Christophe Ghristi avait invité à se produire un artiste en représentation au Capitole. Cette fois, c’est le jeune baryton russe Mikhail Timoshenko qui avait cet honneur. Trentenaire depuis quelques jours à peine, celui qui fut in loco un bouleversant Marcello des dernières reprises de La Bohème, avait sélectionné, sous l’intitulé « Chansons de rêveurs », un programme de mélodies françaises et russes. Accompagné, de manière très experte et finement musicale, par la jeune pianiste bulgare Elitsa Desseva, le récital débute avec Maurice Ravel et se clôture avec Jacques Ibert. Vous avez deviné ? Oui, bien sûr, Mikhail Timoshenko a choisi ces deux musiciens et plus particulièrement leurs compositions autour du plus excentrique des rêveurs de la littérature : Don Quichotte. Sept chansons sont donc au programme : romanesque, épique, à boire, du départ, à Dulcinée, du Duc et, enfin, de la mort de Don Quichotte. Tout un panorama d’émotions que s’approprie ce jeune artiste, bouleversant l’auditoire dans le dernier opus dont la prosodie devient alors d’une parfaite netteté.

Elitsa Desseva et Mikhail Timoshenko sur la scène du Capitole à la fin de leur récital du 9 novembre 2023 – Photo: Classictoulouse

Le programme russe s’ouvre avec… un air d’opéra, et pas n’importe lequel, certainement l’un des sommets de La Dame de Pique de Piotr Ilitch Tchaïkovski, l’air du prince Yeletski. Dans cet aria, le Prince déclare à Lisa l’aimer à la folie et être prêt à réaliser un exploit surhumain si elle le lui demande. Il y a un peu de Don Quichotte dans cette attitude, non ? Avec cet air, Mikhail Timoshenko entre de plain-pied dans le grand lyrisme de sa terre natale.  Et il le fait avec un engagement autant vocal que dramatique confondant de sensibilité, un engagement que les autres mélodies au programme vont confirmer. Qu’elles soient signées Sergei Rachmaninoff, ou bien encore Piotr Ilitch Tchaïkovski, elles sont l’occasion idéale pour entendre ce timbre magnifique, ces couleurs vibrantes d’émotion, ce phrasé large et généreux, ce contrôle du souffle, cet appui imperturbable quel que soit le registre, cette science des dynamiques, en bref, cette certitude d’écouter un magnifique artiste. L’Invitation au voyage de Charles Baudelaire qu’Henri Duparc mit en musique fut le seul bis de ce récital. Il ne fit que creuser davantage notre impatience à revenir écouter ce baryton. Dans l’immédiat ce sera pour les reprises de Boris Godounov** au Théâtre du Capitole, opéra dans lequel il incarne Andrei Chtchelkalov, le Secrétaire de la Douma. Le Royal Opera House londonien l’attendra ensuite pour le Marcello de La Bohème !

Robert Pénavayre

  • Spectacle d’1h, tarif unique 5€, places numérotées.
  • ** Boris Godounov au Capitole du 24 novembre au 3 décembre 2023 – Renseignements et réservations : www.opera.toulouse.fr  

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