Opéra

Les Canticles, des pages essentielles de Benjamin Britten

Anne Le Bozec.. Photo Caroline Doutre

Le rendez-vous que nous donne Christophe Ghristi lundi 24 avril 2023 en l’Auditorium Saint-Pierre-Des-Cuisines est non seulement unique mais particulièrement précieux.

Peut-être jamais donné à Toulouse, ce « cycle » signé Benjamin Britten (1913-1976) a été composé sur une durée de 27 ans. Intitulé Canticles, sa composition s’étale de 1947 à 1974, période la plus représentative du génie de ce musicien. Ecrits à l’attention de son compagnon, le ténor Peter Pears (1910-1986), ces cinq opus, qu’il serait inexact de nommer en français « cantiques », sont en fait plutôt des cantates dans la veine de Bach ou de Haendel. Ce qui n’enlève rien à leur portée spirituelle.  Dépassant largement la durée d’un lied ou d’une mélodie, ils furent composés sur des poèmes recouvrant un demi-millénaire de création littéraire.

Leur interprétation est à géométrie variable. Certes, une partie ténor est toujours présente, mais elle peut aussi s’adjoindre celle d’un baryton, d’un contre-ténor, d’un piano, d’une harpe et même d’un cor.

Le premier de ces canticles (ténor et piano) : Mon Bien-aimé est mien, créé en 1947, ne laisse que peu de doute quant à son destinataire.

Le second est d’une toute autre envergure. Intitulé Abraham et Isaac, créé en 1952, écrit pour contre-ténor, ténor et piano, il évoque l’épisode biblique du sacrifice par le Patriarche de son fils à la demande de Yahvé. Coup de génie, la voix de Dieu est celle à l’unisson des deux protagonistes, les transformant de facto en instruments de Sa volonté. Effet sidérant !

Le troisième, Encore tombe la pluie, créé en 1955, destiné à un ténor, un piano et un cor, évoque tout à la fois la Seconde Guerre mondiale, nous savons combien Britten était pacifiste, et la Passion du Christ.

Cyrille Dubois – Photo: Philippe Delval

L’avant-dernier de ces canticles : Le Voyage des Mages, créé en 1971, réuni contre-ténor, ténor, baryton et piano. C’est celui qui laisse le plus perplexe les musicologues quant à son intérêt trop descriptif.

L’ultime : La Mort de Saint Narcisse, dévolu au ténor accompagné d’une harpe, créé en 1975, est le dernier ouvrage que le compositeur écrivit pour Peter Pears. Il décrit la série bien connue des métamorphoses de Narcisse : un poisson, une jeune fille poursuivie par un ivrogne, un danseur de Dieu, enfin sa mort, percé de flèches et contemplant son propre sang. Ce cinquième canticle n’est pas sans rappeler l’écriture, vocale en particulier, de Mort à Venise, le dernier opéra de Benjamin Britten.

Avec une fabuleuse économie de moyens, le compositeur britannique nous entraîne encore une fois dans son univers si particulier, si original, et à nul autre pareil. Ses Canticles sont en même temps des témoins chronologiques de sa pensée créatrice, et de son évolution durant les vingt-cinq dernières années de sa vie.

Un disque, un récital

La distribution de ce récital est de tout premier plan. Jugez-en. Piano : Anne Le Bozec, ténor : Cyrille Dubois, contre-ténor : William Shelton, baryton : Marc Mauillon, harpe : Pauline Hass, cor : Thibault Hocquet (cor solo de l’ONCT). La quasi intégralité de ce plateau est à retrouver, dans le même programme que celui de Saint-Pierre-Des-Cuisines, sur un cd enregistré à Alfortville en janvier 2019 (label NoMadMusic).

Robert Pénavayre

Renseignements et réservations : www.theatreducapitole.fr

Auditorium Saint-Pierre-Des-Cuisines, lundi 24 avril à 20h. Durée du spectacle : 1h20 sans entracte. Prix unique : 20€

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