Le public toulousain a rencontré pour la première fois Airam Hernandez dans Traviata, puis l’a retrouvé dans la Pénélope de Fauré, Boris Godounov, Norma et dernièrement dans Le Vaisseau fantôme. Ce ténor, né sous le soleil des Îles Canaries, est assurément l’une des découvertes majeures de Christophe Ghristi. Conjuguant à son chant une intensité émotionnelle qui est le signe définitif de l’appartenance à une race rarissime : celle des artistes, il se présente pour ce Midi du Capitole dans un répertoire entièrement consacré à des chansons espagnoles écrites par les plus grands compositeurs ibériques, dont Joaquin Turina, Xavier Montsalvatge, Enrique Guimera et bien d’autres. Dans ce programme, somptueusement accompagné par Anne Le Bozec, l’ADN d’Airam Hernández se déploie avec une luxuriance insolente : le timbre, la prosodie (évidemment !), la musicalité, l’inflexion autant vocale que dramatique de la langue de Cervantès, une communion de tous les instants et comme sur chaque mot et chaque note avec le sens profond du texte et de la musique. L’ardent soleil qui éclaire cette voix ne peut cacher les mille couleurs dont l’artiste la pare. La projection est, au besoin, vaillante mais se plie très souvent aux murmures de la confidence ou de la douleur. Le surtitrage de ces chansons aide précieusement à la compréhension d’un pareil talent car, même à Toulouse, tout le monde n’est pas hispanophone. L’ovation que les deux artistes reçoivent à la fin du programme officiel ne peut que les encourager à revenir par deux fois. La première avec Alfonsina del mar, d’Ariel Ramirez. Ce fut clairement l’acmé de ce récital tant Airam Hernandez a sublimé cette chanson du compositeur de la Misa Criolla. L’émotion indescriptible qu’il lui confie aura fait couler bien des larmes… Ils terminent avec Malaguena du compositeur cubain Ernesto Lecuona. Il fallait bien se quitter cependant mais avec une consolation tout de même : Airam Hernández revient la saison 25/26 par deux fois : La Passagère (en création française) et Carmen !
Robert Pénavayre