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L’orgue de Bach et ses merveilles

L’intégrale Bach organisée par le festival Toulouse les Orgues se poursuit dans la qualité et la diversité. Dimanche 13 décembre, Michel Bouvard était aux commandes du très bel instrument construit par Jürgen Ahrend dans l’église musée des Augustins. Dans le respect des thèmes établis pour chaque récital, le titulaire du Cavaillé-Coll de la basilique Saint-Sernin avait opportunément choisi d’illustrer l’Avent et la Nativité.

Les nombreux Chorals de l’autographe de Leipzig et de l’Orgelbüchlein de Weimar ainsi que les savoureuses Variations canoniques sur « Vom Himmel hoch » constituaient l’essentiel de ce programme et en même temps le plus éblouissant des puzzles musicaux. Les quelques deux douzaines de prodigieuses miniatures interprétées ce jour-là construisent ainsi le portrait du plus fécond, du plus imaginatif, du plus inattendu des créateurs. N’hésitons pas à enfoncer une porte ouverte. Voici la musique d’un génie !

Michel Bouvard, interprète de
J. S. Bach sur l’orgue Ahrend de l’église-musée des Augustins (Photo Alain Huc de Vaubert)

Tout au long de ce récital, le jeu de Michel Bouvard combine habilement la rigueur du rythme et de la structuration à une effervescence, une variété extrême de la registration, donc des couleurs, des timbres, des sonorités. Chaque passage d’un choral à l’autre produit surprise et émerveillement. A ce titre, la transition du tout premier des chorals de Leipzig, comme murmuré à soi-même, aux grondements rocailleux du trio qui suit, surprend autant qu’il réjouit.

L’Orgelbüchlein, destiné selon Bach lui-même aux organistes débutants ( !), réunit les pièces les plus diverses, les plus contrastées. L’interprète joue avec une extrême finesse de ces contrastes, les rendant ainsi plus lisibles encore. Des douceurs célestes du BWV 599 à la gloire triomphante du 609, de l’austérité chaleureuse du 610 « Jesu meine Freude » au nostalgique 614 « Das alte Jahr vergangen ist » (quel sublime adieu à l’année passée !), c’est à un voyage autour de la Nativité et du Nouvel An que nous sommes conviés. Et puis on ne peut passer sous silence l’art de l’imitation, de la paraphrase que l’interprète souligne sans affectation. Les battements d’aile de l’ange, qui parcourent « Vom Himmel kam der Engel Schaar », la musette et les tendres flûtiaux de la Pastorella BWV 590 illustrent magnifiquement ce pouvoir évocateur d’images, si fort dans une musique par ailleurs tellement bien structurée.

Les Variations canoniques BWV 769 jouent sur l’effervescence, la fluidité. Du premier des canons, « all’ottava », frais comme l’eau d’un ruisseau (après tout, Bach = ruisseau en allemand !) au foisonnant final, Michel Bouvard insuffle de la vie, du caractère, des couleurs dans cette littérature qui ne demande que cela.

Un vrai bonheur qui justifie l’ampleur de l’entreprise de Toulouse les Orgues.

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