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Avec Philippe Bianconi, la valse dans tous ses états

Décidemment, la 37ème édition du festival Piano aux Jacobins réserve de belles surprises liées à une élaboration particulièrement soignée et pensée de chaque programme de concert. C’est encore le cas avec le très beau récital que vient d’offrir Philippe Bianconi aux habitués du cloître magique plein à craquer. Le 23 septembre, le grand pianiste présentait un florilège de pièces rares constituant un itinéraire original dédié à la mesure à trois temps. Ce déploiement de virtuosité et de vitalité a ravi un public immédiatement conquis.
Originaire de Nice, Philippe Bianconi mène une carrière internationale d’une qualité musicale exemplaire, loin de tout tapage médiatique et mondain. Depuis son succès au Concours Van Cliburn de 1985, le pianiste a été salué pour son jeu « …allant toujours au cœur de la musique et emplissant l’espace de vie et de poésie » (Washington Post) ; « …son lyrisme et sa hauteur de vue… un jeu puissant, qui fait chanter le piano jusque dans la force et la virtuosité… une sonorité haute en couleur » (Le Figaro). Cette sonorité pleine et colorée jaillit, ce 23 septembre, dès les premières mesures de son programme si original.

Philippe Bianconi au cloître des Jacobins, ce 23 septembre 2016

– Photo Classictoulouse –

Le pianiste a en effet choisi d’honorer la valse à travers une succession de partitions singulières. Saint-Saëns tient une place importante dans ce programme. La Suite en fa majeur op. 90 ouvre la soirée sur une sorte de portique solennel. Les quatre mouvements qui la composent viennent à point rappeler le grand pianiste virtuose que fut Camille Saint-Saëns. La richesse digitale des pièces ainsi dévoilées par Philippe Bianconi en témoigne hautement. Outre les difficultés techniques que le compositeur semble accumuler à dessein, le sens de la grandeur et de l’héroïsme caractérise ces pièces. Ainsi en est-il de la Valse canariote op. 88 composée à Las Palmas en avril 1890, et dédiée à Candelaria Navarro Sigala, jeune pianiste issue de l’une des familles les plus riches de l’archipel des Canaries. Philippe Bianconi fait précéder cette pièce d’inspiration chopinienne de trois Mazurkas aux accents héroïques et de la Valse en la bémol majeur de… Chopin, précisément, démontrant ainsi une certaine filiation. La première partie du concert se conclut sur l’effervescence de l’Etude en forme de valse, toujours de Saint-Saëns. Comme des bulles de champagne !

Le pianiste quitte l’auteur du Carnaval des Animaux avec Souvenirs d’Italie, triptyque coloré composé en 1887 en hommage au pays qu’il visita à plusieurs reprises. Rythmes et couleurs brossent de l’Italie un tableau d’une extrême vitalité. Le rythme de Barcarolle, précisément, incite l’interprète à enchaîner cette œuvre avec la Barcarolle d’une compositrice injustement oubliée, Mel Bonis (1858-1937) qui a pourtant laissé une œuvre importante d’environ trois cents pièces. Au travers du rythme caractéristique de la pièce transparaît un romantisme pleinement assumé que l’interprète souligne sans le surcharger. Autre compositrice de la même époque, mais un peu moins oubliée, Cécile Chaminade est également l’auteur de nombreuses pièces pour piano. Sa Mazurk’suédoise, au titre énigmatique, qui date de 1891, laisse échapper quelques accents d’une sensibilité touchante. La Mazurka, de Claude Debussy, très rarement donnée et qui date de la même époque, constitue une élégante transition vers le diptyque lisztien qui conclut la soirée.

Philippe Bianconi associe en effet deux œuvres qualifiées de valses du compositeur des Années de Pèlerinage. Il souligne admirablement l’élégance de la Valse-Impromptu et « s’attaque » finalement à la célèbre Mephisto-Waltz n° 1. L’interprète en analyse le contenu avec une acuité impressionnante. Certes, il y déchaîne une technique et une virtuosité implacables, mais le satanisme qui s’y exprime revêt un caractère inquiétant. La clarté des plans sonores permet d’en déceler toutes les subtilités. Un grand moment de piano et de musique, tout simplement.

Deux bis sont ardemment réclamés par le public. La première des Valses oubliées, de Franz Liszt est suivie de la Mazurka en la mineur de Frédéric Chopin. Nous ne quittons pas le rythme obsédant des trois temps !

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