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Avant Bayreuth et Salzbourg, Placido Domingo fait une halte à Peralada

La représentation en concert de Thaïs, ce chef-d’œuvre trop peu affiché de Jules Massenet, a connu une affluence record. Facile à imaginer lorsqu’ à l’affiche figure le ténor espagnol, aujourd’hui baryton, Placido Domingo. Une légende vivante ! Celui-ci, avant de s’envoler pour Salzbourg et la prise de rôle de Zurga dans Les Pêcheurs de perles, fera un saut à Bayreuth pour y diriger La Walkyrie.

En attendant, courte halte à Peralada et le voici dans Athanaël, le moine cénobite qui va se damner pour les beaux yeux de la courtisane Thaïs. Le rôle est connu de ce chanteur depuis six ans aujourd’hui, mais le rythme effréné de son activité l’oblige à le chanter, hélas, le nez dans la partition. Ce qui enlève un brin de crédibilité dramatique, vous en conviendrez.

Placido Domingo (Athanaël) et Ermonela Jaho (Thaïs)
– Photo Toti Ferrer –

Au-delà de tout et surtout de l’immense admiration que nous avons pour sa carrière passée… de ténor, force est de constater que l’instrument ténorisant, par définition, même mis face à une partition en clé de fa, s’amenuise de plus en plus, notamment dans le grave. Il est périlleux d’affronter les souvenirs encore brûlants, dans ce rôle, d’un Alain Fondary, archétype à jamais d’Athanaël par la couleur et la puissance de projection. A regarder les engagements de Placido Domingo pour la saison à venir (beaucoup de jeunes professionnels rêveraient de la moitié !), il est permis tout de même de se poser des questions sur les limites du star system. A ses côtés, la soprano albanaise Ermonela Jaho, superbement sensuelle dans une robe fourreau d’un rouge éclatant, défend cette courtisane avec passion, trouvant vocalement son meilleur dans une belle musicalité et un registre supérieur bien accroché. Rossinien de répertoire, le ténor italien Michele Angelini est la surprise de la soirée, détaillant un Nicias au timbre ensoleillé, fier de projection, avec un instrument parfaitement homogène et dans un très bon français. Un artiste à suivre assurément. La basse française Jean Tietgen dessine un Palémon au timbre métallique sans beaucoup de charme. Les phalanges chorales et musicales du Real de Madrid sont ce soir sous la direction de Patrick Fournillier. Il n’est rien de dire que cela s’entend. Coutumier de cette partition depuis une vingtaine d’années, il en délivre une lecture d’une grande émotion et d’une infinie délicatesse de ton. Ce qu’elle mérite. Pour le moins.

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