Festivals

Alfred Brendel, la pensée faite musique

Le 15 août dernier le grand Alfred Brendel proposait aux spectateurs du très bel Usher Hall d’Edimbourg un récital consacré aux compositeurs qui n’ont cessé d’accompagner le grand pianiste allemand tout au long de son exemplaire carrière : Haydn, Mozart, Beethoven, Schubert.

Artiste étonnant, d’une concentration extrême, véritable intellectuel de la musique dans son sens le plus noble, Alfred Brendel construit ses interprétations avec un soin extrême. La palette des couleurs qu’il déploie, la variété des touchers dont il est capable en font un musicien d’exception. Le velouté de son jeu, qui séduit immédiatement, n’élude jamais la puissance expressive dont il nourrit ses interprétations.

Le grand pianiste Alfred Brendel (Photo: Philips & Benjamin Ealovega)

Le pianiste a choisi d’ouvrir et de conclure son récital sur deux sonates en ut mineur, tonalité forte, signées respectivement Haydn et Mozart. Du premier, il souligne l’esprit subtil et ambivalent, développant comme un drame de la légèreté. Au second, il confère un poids particuliers aux silences, comme des non-dits chargés de sens. Le final n’est pas sans évoquer le Schubert des dernières sonates.

De Schubert, justement, Alfred Brendel joue les deux impromptus en fa et en si bémol du D935. Son toucher, d’une extrême délicatesse, prend le ton de la confidence. Paradoxalement, la simplicité du propos, sa familiarité semblent naître d’une multitude de détails à peine esquissés. Schubert secret et pourtant si proche.

L’opus 110, l’avant dernier du sublime corpus des 32 sonates de Beethoven, constitue le cœur du récital. L’interprète le construit comme un grand chant de force et de lumière. Si le Moderato cantabile est abordé avec retenue, comme sur le bout des notes, l’intensité émerge peu à peu d’une incroyable progression. De la dépression comme détachée vers un espoir lumineux. Tout en soignant le moindre détail pianistique, Brendel porte une attention toute particulière à la grande courbe qui sous-tend toute la partition. Jusqu’à cette bouleversante fugue finale, message d’espoir délivré généreusement à toute cette humanité que le compositeur portait en son cœur.

Alfred Brendel, qui sera à Toulouse au cours de la prochaine saison, n’a pas fini de nous éblouir.

Partager

Claire Roserot de Melin, Chevalier des Arts et Lettres
« Dire que le spectacle vivant se meurt n’est pas d’actualité au Capitole » Claire Roserot de Melin
CIE ILLICITE – BAYONNE  – UN «LAC » REVISITÉ
  La CIE Illicite que dirige de main de maître son directeur et chorégraphe, Fabio Lopez, depuis maintenant 10 ans, continue de grandir dans le respect d’un travail académique nourri aux fondements de la danse classique, mais étoffant aussi son répertoire d’un vocabulaire plus contemporain, faisant appel à des
Concert en dialogue entre W. A. Mozart et R. Strauss
Le 20 février prochain, Tarmo Peltokoski, directeur musical de l’Orchestre national du Capitole, propose d’associer la musique de Wolfgang Amadeus Mozart et celle de Richard Strauss.
La sublime noirceur de Chostakovitch
Le cinquantenaire de la disparition de Chostakovitch a été célébré par Les Grands Interprètes lors du concert du 10 février dernier.
L’Espagne rêvée de Maurice Ravel, l’Espagne vécue de Manuel de Falla
La célébration des 150 ans de la naissance de Maurice Ravel a permis de retrouver à Toulouse le grand chef catalan Josep Pons et le pianiste espagnol Javier Perianes.
The Gesualdo Six : la voix des anges
La 4ème rencontre de la saison des Arts Renaissants, le mardi 4 février 2025 dernier, a révélé l’indicible beauté musicale de l’ensemble vocal britannique The Gesualdo Six, invité pour la première fois à Toulouse.