Disques

Le violon dans tous ses états

A quarante ans cette année, Maxim Vengerov a parcouru un itinéraire musical impressionnant. Né à Novossibirsk, en Sibérie occidentale, il a manifesté, dès l’âge de cinq ans, des dons d’une étonnante précocité. Son premier professeur s’exclama à son propos : « Il ne naît un enfant comme Maxim qu’une fois tous les cent ans ! » Warner célèbre cet héritier de la grande école russe de violon par la publication d’un généreux coffret de 19 CDs rassemblant l’essentiel de ses enregistrements auquel s’ajoute un DVD qui brosse le portrait de cet artiste accompli et toujours curieux de nouvelles expériences.

L’archet de Maxim Vengerov, violoniste virtuose jusqu’aux plus extrêmes démonstrations, possède un incontestable brio. Mais son talent ne se limite pas à son incomparable technique. Le contenu de cette parution en forme de bilan, certes provisoire, en est une preuve indéniable. Les trois principaux volets de ses activités de musicien sont ici illustrés : les grands concertos, la musique de chambre et les pièces virtuoses. Pour les grands concertos du répertoire, Vengerov sait choisir ses partenaires.

Zubin Mehta dirige l’Israël Philharmonic Orchestra dans les partitions de Paganini, Waxman, et Saint-Saëns. C’est avec Kurt Masur et les célèbres phalanges du Gewandhaus de Leipzig et du New York Philharmonic qu’il aborde Bruch, Mendelssohn et Dvořák. Claudio Abbado l’accompagne dans Tchaïkovski et Glazounov avec la Philharmonie de Berlin et Antonio Pappano pour les musiques françaises, Lalo, Saint-Saëns et Ravel avec le Philharmonia de Londres. Sa collaboration avec Daniel Barenboim et le Chicago Symphony Orchestra couvre le vaste domaine concertant, de Sibelius, Nielsen, Brahms, mais aussi la sonate n° 3 de Brahms, Barenboim étant alors au piano. Mais c’est pourtant avec Mstislav Rostropovitch, à la tête du London Symphony Orchestra, que les rencontres se révèlent les plus riches et les plus complètes. C’est ainsi que figurent dans ce coffret les principales œuvres concertantes de Prokofiev et Chostakovitch (les deux concertos de chaque compositeur), Chédrine (ou Chtchedrin), Stravinski, Beethoven (le concerto et les deux romances) ainsi que de Britten et Walton. Pour ce dernier il s’agit de son concerto pour alto, un instrument qui fascine Maxim Vengerov.

Dans l’ensemble de sonates signées Mozart, Beethoven, Mendelssohn et Elgar, Maxim Vengerov s’associe aux pianistes Alexandre Markovitch, Itamar Golan ou encore Ian Brown. Tout un CD est en outre consacré à des pièces pour violon seul, d’Eugène Ysaÿe à Rodion Chédrine, en passant bien sûr par Johann Sebastian Bach, joué sur un violon… baroque.

Une multitude de courtes pièces de virtuosité, dans lesquelles excelle le violoniste occupent trois CDs. Paganini, Sarasate, Wieniawski, Brahms, Tchaïkovski, ces charmants bonbons viennois concoctés par Kreisler, ou encore cette partition quasiment injouable, La Ronde des Lutins de Bazzini, donnent à l’interprète matière à briller de mille feux.

Chaque prestation met en évidence la sonorité impériale du violoniste, son vibrato idéal, la perfection de sa technique, son engagement expressif toujours tempéré par la sérénité chaleureuse d’un jeu apollinien.

Le contenu du DVD qui complète ce coffret date de 2005 (pour le trentième anniversaire de l’artiste). On y découvre son retour vers ses racines sibériennes, l’émotion de ses collaborations avec Mstislav Rostropovitch et l’étendue incroyable de sa curiosité. Son attirance pour le violon électrique, rencontré avec Didier Lockwood, le jazz et même le tango qu’il pratique sur scène à l’occasion de la création d’une œuvre iconoclaste de Benjamin Yusupov. On en apprend beaucoup sur sa décision de prendre une année sabbatique au faîte de sa célébrité.

Voici une parution qui conjugue un large panorama du répertoire pour violon concertant et le portrait riche et révélateur d’un de ses plus ardents défenseurs.

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