Danse

L’hommage à un mythe : Vaslaw Nijinski.

Pour clôturer cette saison de danse au Ballet du Capitole, Kader Belarbi propose un hommage au mythique danseur et chorégraphe russe Vaslaw Nijinski, en reprenant les ballets emblématiques où ce « Dieu de la danse » s’est illustré avec les Ballets Russes de Serge Diaghilev. Pour ce faire il a demandé à quatre chorégraphes contemporains, John Neumeier, David Dawson, Michel Kelemenis et Stijn Celis, d’évoquer ou de revisiter, à leur manière, la figure emblématique de Nijinski.
C’est avec trois entrées au répertoire et une création que Kader Belarbi compose le programme de cette fin de saison chorégraphique qui réunira, pour plusieurs soirées la danse et la musique, puisque les quatre ballets seront accompagnés par deux pianistes, Nino Pavlenichvili et Jonas Vitaud, et une mezzo-soprano, Victoire Brunel. Quelle meilleure alliance pour fêter dignement la Fête de la Musique !

John Neumeier, l’un des grands chorégraphes contemporains, a choisi dans Vaslaw, d’évoquer l’homme, cet être énigmatique, caché derrière le danseur. Sur le Clavier bien tempéré et les Suites Françaises de Bach, il nous fait découvrir cet homme vulnérable, terriblement secret dont les chorégraphies, bien en avance sur son temps ont été parfois bien incomprises.

La Villanelle et le Spectre de la Rose, extraits des Nuits d’été de Berlioz, ont inspiré Michel Kelemenis pour Kiki la Rose et sa vision personnelle du célèbre port de bras du danseur russe dans son célébrissime Spectre de la Rose dans la chorégraphie de Michel Fokine.

L’affiche originale des Ballets Russes

Le chorégraphe John Neumeier

David Dawson, fort apprécié du public toulousain (souvenons-nous de son ballet A Million Kisses to My Skin), nous offre sa relecture personnelle de l’Après-midi d’un Faune, rebaptisé Faun(e), qu’il créa il y a 10 ans à Londres avec l’English National Ballet, et qui, pour la circonstance, en fait un rôle alternativement féminin et masculin, sur la toujours très prenante musique de Claude Debussy

Enfin Stijn Celis, qui nous avait présenté sa version des Noces, reprend l’un des plus grands succès de Nijinski, Petrouchka, pour en faire une création extrêmement personnelle et contemporaine, sur la musique d’Igor Stravinski.

C’est un programme ambitieux, résolument contemporain, signé par les chorégraphes parmi les plus importants de la danse actuelle.

Comme à l’accoutumée, une série de manifestation aura lieu autour de Nijinski, Clown de Dieu.

La cinémathèque propose, le mardi 11 juin à 20 h 30, le film d’Elizabeth Kapnist : Vaslav Nijinski, une âme en exil.

Samedi 15 juin, à 12h15 à la Halle aux Grains un cours de danse ouvert au public, sera suivi à 19 h par le Grand Carnet de Danse qui présentera l’analyse historique, technique et stylistique de l’œuvre en présence de chorégraphes, historiens et danseurs du Ballet du Capitole.

Enfin, le samedi 15 juin réunira danseurs du Capitole, amateurs et professionnels pour le cours de barre, à 12 h 15, à la Halle aux Grains.
Annie Rodriguez

Kader Belarbi nous parle de Nijinski, Clown de Dieu
« J’ai donné le titre de Nijinski, Clown de Dieu parce que j’ai été fasciné par le personnage. La première chose que j’ai lue c’est « Nijinski ou la grâce » de Françoise Reiss. J’avais 18 ans et j’ai trouvé ça incroyable, et j’avais travaillé dessus. J’ai eu la chance de danser le Faune. Je me souviens très bien de Bronislava Nijinska qui était venue dans le studio Zambelli. J’ai connu plusieurs versions de ce Faune. Evidemment celle de Rudolf Noureev. C’est pareil pour Pétrouchka : j’ai eu au moins 3 versions, dont celle de Golovine que je trouve la plus formidable, celle de Patrice Bart, et d’autres. J’ai eu la chance de danser énormément de choses avec Nijinski, en particulier Vaslaw en alternance avec Patrick Dupont et j’ai adoré faire cette chorégraphie de John Neumeier. Et j’ai voulu le reprendre ici car il faut doter le répertoire de grands noms : John Neumeier, que je connais depuis 40 ans, et qui était là pour auditionner les danseurs pour son ballet, est un grand monsieur de la danse, et je trouve important que son nom soit inscrit dans le répertoire.

Kader Belarbi © David Herrero

Et Michel Kelemenis n’était pas très loin, j’ai beaucoup travaillé avec lui, et lui-même a beaucoup travaillé sur Nijinski sur Faune Fomitch par exemple. Mais là il s’agit de Kiki la Rose. Tout ceci était interrelié et je me suis dit comment faire, et le titre, Clown de Dieu, était important, car cela signifiait de travailler encore sur une nouvelle vision d’un personnage que tout le monde connaît. Je ne voulais pas redonner le Spectre de la Rose, ou l’Après-midi d’un Faune, tels quels. Ce que je trouve bien c’est que Vaslaw parle des états de ce personnage tout au long de ces « Suites Françaises » et ce « Clavier bien tempéré » de Bach. Il y a une émotion, des qualités et des états à dire, et j’ai trouvé intéressant de commencer sur une forme de neutralité et d’arriver ensuite sur le Faun(e). Finalement la soirée est un « reloading » de Nijinski, une sorte de version actuelle, contemporaine (dans le sens actuel).

David Dawson, qui est un fidèle, reprend ce Faun(e) et je lui ai proposé de faire ça en alternance masculin-féminin. Il y aura donc deux garçons ou deux filles. C’est la réversibilité, la dualité qu’il peut y avoir entre deux hommes ou deux femmes, en jouant d’une manière plus abstraite sur l’érotisme, l’intimité.

Pour Michel Kelemenis qui a déjà travaillé sur Kiki la Rose, dont il existe de nombreuses versions, j’avais demandé aussi la réversibilité, mais là je crains que le nombre de danseurs fasse que ce soit compliqué, donc je reviens simplement à faire un solo d’un garçon. C’est une autre vue sur l’évanescence, la Rose, sur le port de bras de Nijinski.

Pour Pétrouchka, c’est Stijn Celis, que j’apprécie énormément, qui est en train d’en faire une création, avec une perception plus abstraite de cette marionnette. Il l’a mise sous une forme de 9, 10 danseurs ou 9, 10 danseuses, et c’est un pantin qui vit dans un monde de catcheurs mexicains. Le visage disparaît un petit peu, mais le corps va sans doute parler et ce sera sa propre vision.

L’idée de cette soirée, également, est que nous sommes à la Halle aux Grains, qu’il n’y a pas d’orchestre et que nous sommes en live. Donc je trouve superbe d’avoir pu obtenir la présence de deux pianistes et d’une mezzo-soprano, tout au long de la soirée. Et cela pendant la Fête de la Musique qui une invitation pour tous à écouter de la musique en live ! Ce qui est formidable c’est que nous aurons un piano pour Vaslaw, deux pianos pour le Faune, un piano et une mezzo-soprano pour la Rose, et deux pianos pour Petrouchka puisqu’il s’agit de la version pour deux pianos. Je pense donc que ce sera une soirée riche à tout point de vue, musical, artistique, chorégraphique, stylistique, qui clôturera une saison de danse avec trois entrées au répertoire et une création ».

Partager