Les fêtes de fin d’année ont scintillé de mille feux sous la baguette magique de George Balanchine. Le public se pressait ce soir de première tant l’affiche était alléchante. Le retour de Mister B, qui a occupé si longtemps et si brillamment la scène du Capitole avec un programme, parfait trait d’union entre le russe Georgi Melitonovitch Balanchivadze et l’américain George Balanchine.
Le rideau s’ouvre sur l’azur d’un fond de scène illuminé par deux lustres précieux, et le chatoiement des costumes irisés de la Compagnie, telle une estampe qui nous replonge dans les fastes impériaux de la vieille Russie.
C’est Thème et Variations qui ouvre le bal sur la musique de Tchaïkovski. Technicité, virtuosité et dynamisme sont les redoutables composantes de cette pièce. Le corps de ballet assure de belle façon toutes les embûches semées sous ses pas. Et même si, le soir de la première, on a pu constater quelques imprécisions, la polonaise qui clôt le ballet fit tout oublier tant elle fut brillante et remarquable de virtuosité. Natalia de Froberville et Kléber Rebello étaient les solistes de cette pièce. Le demi-soliste a démontré, comme à l’accoutumée, sa grande technicité en particulier dans ses tours en l’air et ses pirouettes. Quant à Natalia de Froberville, elle fut la fée de ce ballet, toute en musicalité et en vivacité, son port de bras ajoutant une infinie élégance à sa danse. A leur côté, on retrouve les très talentueux solistes et demi-solistes que sont Sofia Caminiti, Solène Monereau, Kayo Nakasato, Tiphaine Prévost (et le petit clin d’œil aux quatre petits cygnes du Lac !) entourées de Rouslan Savdenov, Minoru Kaneko, Simon Catonnet et Jérémy Leydier qui sont la preuve que dans cette compagnie toulousaine il y a bien quatre étoiles, mais il y a aussi une pléiade de talents que les chorégraphes invités savent très bien reconnaître.
Thème et Variations – Kleber Rebello – ©David Herrero
Le spectacle se poursuit avec Tchaïkovski-Pas de Deux. Le schéma du ballet est très classique : adagio, variations et coda. Sur scène on retrouve l’étoile Ramiro Gómez Samón et la toute charmante Nina Queiroz, talentueuse demi-soliste. Sa danse est légère, lumineuse, virevoltante comme sa robe, peut-être lui manque-t-il à de rares moments un peu rapidité dans ses fouettés, mais sa prestation répond bien à la magie du chorégraphe. A ses côtés, Ramiro Gómez Samón démontre une fois de plus sa grande précision technique par son élévation, l’assurance de ses sauts et de ses tours. Il est aussi le partenaire attentif sachant mettre en valeur sa danseuse. Ils nous donnèrent une belle leçon de cette grammaire classique que Balanchine n’oublia jamais.
Tchaïkovski Pas de Deux – Nina Queiroz – Ramiro Gomez Samon – ©David Herrero
Who Care’s –Total changement de décor, pour la deuxième partie de ce programme. Le rideau s’ouvre sur les gratte-ciels newyorkais nimbés de lumière. Oubliés les tutus et le velours des pourpoints, place aux jupettes qui s’envolent et aux gilets rayés ! L’entrain joyeux des danseurs du corps de ballet plante le décor sur les rythmes jazzy du compositeur américain. Après ces ensembles se succèdent cinq duos dansés par tous ces talents dont nous avons parlé plus haut. On y retrouve Sofia Caminati, et Jeremy Leydier, Solène Monnereau et Minoru Kaneko, Juliette Itou et Simon Catonnet et tous les autres, aussi à l’aise dans le classicisme des précédents ballets que dans ce style si particulier des comédies musicales qui font les beaux jours de Broadway. Dans ce que l’on peut considérer comme la deuxième partie de ce ballet, on retrouve les deux dernières étoiles nommées au Ballet du Capitole : Marlen Fuerte Castro et Jacopo Belussi, dont c’est la première présentation sue la scène capitoline. Marlen Fuerte Castro déploie tout son charme sensuel, sa musicalité, ses dons techniques. Jacopo Belussi l’entoure, la suit, et démontre un véritable sens de la danse . Nous le retrouvons ensuite auprès de Kayo Nakazato, toujours aussi musicale, de Tiphaine Prévost égale à elle-même dans la précision de sa danse, puis il nous régale de quelques grands sauts et d’une technique parfaitement maîtrisée dans un solo qui nous laisse augurer de belles émotions lorsque nous le retrouverons en fin de saison dans le Coppélia de Jean Guillaume Bart.
Who Care’s – Marlen Fuerte Castro – Jacopo Belussi – ©David Herrero
S’il est une évidence apparue lors de cette soirée, c’est celle de la très grande qualité du Ballet National du Capitole, et surtout du nombre impressionnant de talents individuels, de pépites précieuses, qui le composent.
Nous avons également retrouvé pour ces représentations à la tête de l’Orchestre National du Capitole, Fayçal Karaoui, grand spécialiste de la musique de ballet. Ce sont Ben Huys et Diana White, répétiteurs pour le George Balanchine Trust, qui ont été chargé de restituer la chorégraphie et le style de George Balanchine. La chaleur des applaudissements et leur longueur sont bien la preuve que Toulouse a retrouvé Mister B avec un énorme bonheur.
Annie Rodriguez