Concerts

Scarlatti sacré révélé par Le Caravansérail

Les membres du Caravansérail dirigés par Bertrand Cuiller - Photo Monique Boutolleau -

Le 28 mars dernier, l’ensemble vocal et instrumental Le Caravansérail, sous la direction de Bertrand Cuiller était l’invité de la saison des Arts Renaissants. Un public nombreux, attentif et rapidement séduit a rempli l’église Saint-Jérôme qui hébergeait cette rencontre saluée avec enthousiasme. Un programme rare consacré à un compositeur pourtant bien connu, Domenico Scarlatti, attendait les mélomanes curieux.

Alors en résidence à Royaumont comme claveciniste, Bertrand Cuiller a décidé de se lancer dans une nouvelle aventure. Il fonde en 2015 un ensemble qui sera une extension de son activité de soliste et continuiste, Le Caravansérail. Un nouveau terrain d’expérimentation s’ouvre alors. Tantôt groupe de musique de chambre, tantôt orchestre d’opéra, Le Caravansérail aborde tous les répertoires propres aux XVIIe et XVIIIe siècles et va jusqu’à des rencontres avec les musiques actuelles et de création.

Composé de dix chanteurs et quatre instrumentistes, tous dirigés par Bertrand Cuiller, l’ensemble décide ce soir-là de consacrer son programme à l’œuvre sacrée de Domenico Scarlatti, essentiellement conçue pendant les années d’apprentissage du jeune compositeur. Reconnaissons que son imposant corpus pour clavier, environ 555 sonates, constitue la forêt qui cette fois cache les arbres de ses productions vocales et sacrées.

Une messe, un Te Deum et un Stabat Mater composent le somptueux programme de ce concert du 28 mars. L’ensemble des chanteurs réunis ici présente des qualités rares aussi bien individuelles que collectives. Les différents registres s’équilibrent parfaitement, les timbres et les couleurs vocales s’avèrent d’un extrême raffinement sans parler de la justesse, de la précision et de la diction. Les voix lumineuses des quatre sopranos, la rondeur séduisante de celles des deux contre-ténors alto, les spécificités complémentaires des deux ténors et des deux basses se conjuguent pour explorer et restituer un monde sacré encore trop peu diffusé. Le continuo, qui rassemble un théorbe, un violoncelle, une contrebasse et un orgue positif apporte un soutien parfait à l’ensemble vocal. La direction à la fois précise et sensible de Bertrand Cuiller coordonne efficacement toutes les forces musicales.

Bertrand Cuiller – Photo Monique Boutolleau –

La Missa brevis Quatuor Vocum, dite « Messe de Madrid », en raison d’une retranscription présente dans un manuscrit de la Chapelle royale espagnole en 1754 s’ouvre sur une douceur angélique puis les parties de l’ordinaire de la messe se diversifient habilement, de la contrition à la ferveur. Chaque registre vocal adapte ses interventions en harmonie aussi bien avec le texte qu’avec la subtilité des modulations.

La Sonate en sol mineur K. 30, dédié à João V du Portugal, jouée à l’orgue par Jean-Luc Ho vient ici rappeler le rôle capital de Scarlatti dans l’art du clavier. Elle est suivie du solennel Te Deum à double chœur à huit voix, probablement donné en 1722 en l’église São Roque de Lisbonne. La direction vive, nerveuse de Bertrand Cuiller confère à cette œuvre brillante une animation et un éclat impressionnants.

Les chanteurs au salut final – Photo Classictoulouse –

L’ensemble des interprètes se retrouve enfin dans l’exécution du Stabat Mater à 10 voix et basse continue. Cette partition a probablement été composée entre 1714 et 1719, quand Scarlatti était maître de chapelle de la Cappella Giulia, chœur d’hommes destiné à la musique de Saint-Pierre de Rome. Elle recèle des merveilles de raffinement harmonique et contrapuntiques. La structure en double chœur produit de subtils échanges qui soutiennent l’expression de douleur, parfois ardente, mais aussi de révolte. L’œuvre s’achève sur un Amen fervent aux développements expressifs éblouissants.

Les applaudissements nourris du public obtiennent des chanteurs et des musiciens un retour sur les premières mesures du Stabat Mater.

Serge Chauzy

Programme du concert donné le 28 mars 2023 à 20 heures en l’église Saint-Jérôme de Toulouse :

•             Domenico Scarlatti (1685-1757)

–              Missa brevis Quatuor Vocum, ou « Messe de Madrid »

–              Sonate pour clavier en sol mineur, K. 30

–              Te Deum à double chœur

–              Stabat Mater à 10 voix et basse continue

Partager

Bertrand Chamayou de retour à Toulouse
Le 29 avril prochain, Grands Interprètes invite le grand pianiste toulousain pour un récital particulièrement attendu.
Souvenirs d’Europe centrale au programme des Clefs de Saint-Pierre
La 25ème saison des Clefs de Saint-Pierre se conclut le 28 avril prochain.
L’Orchestre national du Capitole reçoit Ton Koopman et la Maîtrise de Toulouse
Mozart et Pergolesi sont inscrits au programme du concert donné le 25 avril prochain par l’Orchestre national du Capitole sous la direction de Ton Koopman.
BALLET NATIONAL DU CAPITOLE : LE RETOUR DE LA FILLE AUX YEUX D’ÉMAIL.
Coppélia – Natalia de Froberville – Ramiro Gomez Samon en répétition-  © David Herrero Coppélia revient sur la scène du Capitole ; elle nous était venue en 2016 de la main de Charles Jude, c’est une autre ancienne étoile de l’Opéra, Jean Guillaume Bart qui nous la ramène aujourd’hui.. Coppélia,
La grande dame du piano et son complice en musique
Le retour à Toulouse de Martha Argerich constitue toujours un événement musical particulier.
BALLET NATIONAL DU CAPITOLE – SAISON 2025-2026  
Pour sa   troisième saison à la direction du Ballet National du Capitole , Beate Vollack nous fait quatre propositions où l’on retrouve toutes les formes de danse, du classique au néo-classique et au contemporain. Certains ballets sont à revoir, d’autres sont des créations. Pour célébrer le cent cinquantième anniversaire