Une fois de plus la Philharmonie de Saint-Pétersbourg déploie ses fastes sonores dans une Halle-aux-Grains conquise. Le 5 mars dernier, Yuri Temirkanov dirigeait son orchestre à Toulouse dans un programme de musique russe.
Riche et sombre, intense et pourtant d’une remarquable transparence, la sonorité de cette incomparable phalange possède des caractéristiques qui lui sont propres. La densité des cordes en est peut-être la plus évidente. Une densité qui ne signifie pas opacité.
La première œuvre inscrite au programme en fournit la preuve absolue. La 1ère symphonie de Prokofiev, qualifiée de « Classique », réclame clarté et légèreté. Yuri Temirkanov en détaille les traits avec une grâce particulière. De l’Allegro initial, brillant et facétieux, au Larghetto rêveur, jusqu’à l’effervescence populaire, mais toujours pleine de distinction, du Finale.
La jeune violoniste japonaise
Sayaka Shoji
(photo Evgeny Rodkin)
La jeune violoniste japonaise Sayaka Shoji aborde ensuite la redoutable partie soliste du 1er concerto pour violon et orchestre du même Prokofiev. Cette partition géniale, d’une force de conviction, d’une grandeur tragique inouïes réclame maîtrise instrumentale et imagination. Deux qualités que possède la soliste. D’aspect frêle, presque fragile, Sayaka Shoji puise son énergie dans une technique et une conviction impressionnantes. Elle n’hésite pas à « salir » la sonorité de son splendide instrument lorsque l’expression l’exige. Jeu fluide, jeu heurté se succèdent et s’opposent avec une étonnante volubilité. L’orchestre lui ménage un écrin de luxe.
Ce même orchestre retrouve la tradition du ballet russe avec la suite du « Lac des cygnes » de Tchaïkovski, qui occupe toute la seconde partie du concert.
Dans cette alternance de numéros exaltants et parfois un peu conventionnels, la phalange russe est à son apogée. La dynamique sonore atteint un degré unique de perfection. Yuri Temirkanov, dont la gestique reste un mystère quelque peu chorégraphique, ne néglige aucun détail, soulignant telle phrase, emportant ses musiciens dans un tourbillon musical d’une parfaite précision.
Deux bis tout aussi « tchaïkovskiens » (dont un extrait de « Casse-noisettes ») calment difficilement l’enthousiasme du public.