Concerts

Poignant Schubert

Le tendre, le sensible Schubert a inspiré à Gilles Colliard et à ses musiciens de l’Orchestre de Chambre de Toulouse un programme étonnant de force et de profondeur. Le quatuor à cordes « La Jeune fille et la mort » en constitue le cœur et l’aboutissement. C’était un mémorable concert, le 17 novembre dernier à l’auditorium Saint-Pierre des Cuisines.
Gilles Colliard, qui a dû surmonter ce soir-là une sérieuse crise de sciatique, visiblement très douloureuse, n’en a pas moins assuré la direction de son orchestre, la présentation du programme et la partie soliste du Rondo en la mineur pour violon et cordes. Grâce lui en soit rendue !

Gilles Colliard joue ici en soliste le Rondo en la majeur de Schubert

(Photo Classictoulouse)

La grande surprise vient des premières notes du Menuet n° 3 qui ouvre le concert. Les accents nostalgiques et tristes de cette courte pièce détournent étrangement la légèreté sous-entendue dans son titre. Comme une fantomatique danse des ombres, elle distille un doute, une mélancolie auxquels les musiciens de l’Orchestre de Chambre confèrent tout leur poids, toute leur profondeur.

Avec le Rondo D 438, le gracieux Schubert des réunions musicales entre amis témoigne de son insouciance passagère, de son sens de la finesse mélodique, de son classicisme souriant. Gilles Colliard en assume crânement la partie soliste avec un panache qui n’exclut en rien la profondeur de l’expression toujours présente chez Schubert.

Le 14ème quatuor à cordes, écrit dans la tonalité tragique de ré mineur, ne fut pas édité du vivant de Schubert. Il concentre probablement une intensité dramatique difficilement supportable par ses contemporains. Son sous-titre « La Jeune fille et la mort » provient du thème de son deuxième mouvement qui reprend, en le variant, celui du lied « Der Tod und das Mädchen » composé en 1817 sur un court poème de Mathias Claudius. Une œuvre poignante comme seul Schubert a pu la concevoir. A la suite de Gustav Mahler, qui a transcrit la partition pour orchestre symphonique, Gilles Colliard en a réalisé une passionnante version pour orchestre à cordes. Les « agrandissements » de quatuors à cordes sonnent parfois un peu enrobés, le traitement orchestral alourdissant la vivacité du propos. Il n’en est rien ici. Le drame évoqué par la musique reste d’une acuité brûlante. La précision admirable des archets, l’absence d’inertie, l’immédiateté des réactions renforcent encore l’intensité d’une partition qui n’a pas d’équivalent dans toute la littérature pour quatuor à cordes.

La tragédie de l’Allegro initial éclate avec une rage, une révolte qui clouent l’auditeur à son fauteuil. Le drame dans toute sa cruauté ! Dans le déchirant Andante con moto, les variations sur le thème douloureux du lied initial s’écoutent comme une berceuse de la mort. Fascinant cheminement vers un au-delà qui hypnotise. Les cordes diaboliques du Scherzo, dont le thème principal sera repris par Wagner dans son « Rheingold », aboutissent irrémédiablement à la danse macabre du Presto final, comme une plongée dans un inconnu effrayant, après une chevauchée fantastique.

Bouleversant témoignage d’un compositeur que l’on ne cesse de redécouvrir. Un grand bravo aux interprètes pour leur engagement et leur sensibilité !

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