A l’approche de Noël, les manifestations musicales rivalisent de ferveur et d’originalité. La belle Maîtrise de Toulouse, dirigée par son fondateur Mark Opstad, participait déjà, le 16 décembre dernier à la Halle aux Grains, à la célébration organisée par les cuivres et les percussions de l’Orchestre national du Capitole. Ce 22 décembre, en la basilique Saint-Sernin, l’ensemble vocal au complet s’associait à l’orgue Cavaillé-Coll de la basilique Saint-Sernin joué par son titulaire, Michel Bouvard.
Ce soir-là, une foule compacte et enthousiaste emplit la nef de la basilique, attirée par la conjonction entre les circonstances festives et la promesse d’un grand moment musical. Il est vrai que la Maîtrise de Toulouse, créée en 2006 au sein du Conservatoire de Toulouse par son fondateur anglo-français Mark Opstad, est la première structure maîtrisienne du sud-ouest de la France. La qualité exceptionnelle que cet ensemble vocal a rapidement atteinte lui a permis de recevoir de prestigieuses récompenses dont le prestigieux 27ème Prix Liliane Bettencourt pour le Chant Choral en 2017. Par ailleurs, Michel Bouvard, qui mène depuis 30 ans une double carrière de concertiste et de professeur, connaît mieux que quiconque ce grand orgue de Saint-Sernin dont il tire les sonorités et les couleurs les plus subtiles, les plus généreuses.
Associées ainsi pour cette célébration, les deux entités sont, tout d’abord, accueillies avec chaleur par le Père Bogdan Velyanyk, curé-recteur de la basilique. Ils présentent ensuite brièvement le programme musical de la soirée au cours de laquelle les membres de la Maîtrise sont appelés à « processionner » du fond de l’édifice vers le chœur, en fonction des pièces présentées. Œuvres a cappella et accompagnées par l’orgue alternent avec quelques partitions pour orgue seul. Le programme musical révèle de très belles pièces habilement complémentaires quant à leurs styles et leurs contenus festifs.
Après un chant grégorien d’une belle profondeur, de splendides motets de Samuel Scheidt, Mateo Flecha et Thomas Weelkes, grands compositeurs de la Renaissance, précèdent le mise en musique du graduel Virga Jesse floruit composée par Anton Bruckner en 1885. En dépit du grand écart temporel, aucune rupture de style ne vient perturber la continuité de l’expression. On retrouve avec plaisir les qualités profondes de la Maîtrise, la précision des attaques et de la diction, la justesse, le bel équilibre entre les registres, ce subtil mélange d’éclat et de douceur…
Une série de trois Noëls anglais contemporains se succèdent. Signés Becky McGlade, Andrew Carter et… Mark Opstad lui-même, ils perpétuent une tradition séculaire d’une grande qualité musicale. Pas moins de cinq Noëls français traditionnels, accompagnés par le grand orgue, sont chantés dans des harmonisations nouvelles. Quatre d’entre elles sont dues à Mark Opstad : Noël nouvelet, Quittez pasteurs, Quelle est cette odeur agréable et le Noël toulousain chanté en occitan. Le cinquième de ces Noëls, Jai vu trois bateaux sur la mer, est signé Jean Bouvard, le propre grand-père de l’organiste. Michel Bouvard, quant à lui, utilise toutes les belle ressources du Cavaillé-Coll dans quelques pièces très variées. Les deux Danceries de Claude Gervaise et le Tambourin de Michel Corrette ouvrent joyeusement la série.
Après le choral de Dietrich Buxtehude, Puer Natus in Bethlehem, il déploie les subtiles couleurs de la méditation intitulée Les Enfants de Dieu, extraite du recueil La Nativité du Seigneur, d’Olivier Messiaen, témoignage de la foi naïve du compositeur de 27 ans. Quant à la pièce Variations sur un Noël basque, de Jean Bouvard, elle renoue avec une belle tradition familiale.
Après une ultime procession, le chœur et l’orgue se lancent dans une déclamation quelques peu jazzy du choral intitulé Nova Nova et composé par le Britannique Iain Farrington (né en 1977 et animateur du récent couronnement de Charles III !) sur un texte anglais du 15ème siècle, basé sur St Luke’s Gospel.
Une conclusion pleine de joie de vivre !
Serge Chauzy