Le 15 juillet dernier, à 19h, en l’église du Gesù de Toulouse, l’Académie de l’Atelier vocal du Chœur de chambre Les Eléments animait l’un des grands concerts des Quartiers d’Eté du festival Toulouse les Orgues. Une belle soirée de découverte musicale abondamment applaudie !
La Messe de Requiem d’Alfred Desenclos (1912-1971) constitue l’apogée de ce concert. Composée en 1963 pour chœur, solistes et orchestre, cette partition encore trop rare, a été transcrite pour orgue, chœur et solistes par le compositeur lui-même. C’est cette version qui occupe l’essentiel du programme, placé sous la direction de Joël Suhubiette, Directeur musical du Chœur de Chambre Les Eléments, avec à l’orgue Yves Rechsteiner, Directeur artistique de Toulouse les Orgues.
Rappelons que le Chœur Les Eléments a initié en 2021 avec Toulouse les Orgues un partenariat dans le cadre des « Quartiers d’été », autour des transcriptions pour chœur et orgue des grands Requiem du répertoire. Ont ainsi été présentées notamment les transcriptions des messes de Requiem de Saint-Saëns, de Mozart de Maurice Duruflé.
Le concert s’ouvre sur deux pièces pour orgue seul, jouées par Yves Rechsteiner sur le petit, mais superbe, Cavaillé-Coll de la tribune. Construit en 1864 par l’illustre facteur, cet instrument est considéré comme un authentique chef-d’œuvre. Du compositeur Henri Dallier (1849-1934), le Stella Matutina et O clemens, O pia, détaillés avec art par Yves Rechsteiner, déploient donc en introduction un climat apaisé et d’une grande piété.

– Photo Classictoulouse –
L’exécution du Requiem d’Alfred Desenclos est précédée de celle de quatre pièces d’envergure plus intime du même compositeur. L’Ave Maria pour basse solo et orgue est tout d’abord déclamée avec une touchante tendresse par Cyrille Goutreau. O Salutaris, pour soprano et orgue met en évidence l’impressionnante projection vocale de Cécile Dibon-Lafarge. Toutes les couleurs du chœur a cappella émanent du Salve Regina, alors que la réunion du chœur, des quatre solistes et de l’orgue met en évidence toute la richesse polyphonique du splendide Agnus Dei.
L’exécution très attendue du Requiem révèle les grandes beautés d’une écriture à la fois raffinée et diverse. On ne peut qu’admirer la succession des choix harmoniques et l’originalité des modulations de cette trop rare partition. Une grande ferveur anime l’Introït et Kyrie initial. L’Offertoire et le Sanctus déploient un art consommé du traitement des voix, aussi bien chorales que solistes. En particulier dans le Sanctus on observe comme une référence, consciente ou non, au style d’écriture de Maurice Ravel, notamment dans le traitement du chœur du ballet Daphnis et Chloé !
La belle fusion des quatre voix solistes du Pie Jesu, la conviction expressive de l’Agnus Dei et la ferveur qui anime le Libera me précèdent les contrastes musicaux de l’émouvant In Paradisum final. Chaque voix soliste se mêle avec art au tutti. La finesse expressive caractérise les interventions du ténor Yu Shao et de l’alto Cécile Piovan, alors que l’ampleur vocale de la soprano Cécile Dibon-Lafarge et de la basse Cyrille Gotreau « ensoleille » l’ensemble.

– Photo Classictoulouse –
Saluons la perfection du synchronisme entre les déploiements sonores de l’orgue et ceux des voix du chœur, pourtant très éloignés l’un des autres. On remarque que le chef, Joël Suhubiette, et l’organiste, Yves Rechsteiner, restent en permanence en contact visuel grâce à un système de caméra et d’écran parfaitement utilisé ce soir-là !
L’ovation unanime qui salue cette exécution motive les interprètes qui reprennent l’un des grands moments de cette soirée, le Sanctus du Requiem.
A noter le fait que le Chœur de Chambre Les Eléments a déjà réalisé un enregistrement CD de ce Requiem aux Editions Hortus. Un bon moyen de retrouver cette belle œuvre trop rarement programmée.
Serge Chauzy