Concerts

Le carnaval des musiciens

Pour leur concert d’ouverture, le 13 octobre dernier, les musiciens des Clefs de Saint-Pierre avaient choisi de visiter la ménagerie de Saint-Saëns. Pas moins de dix des membres du bel Orchestre du Capitole abordaient ce fameux et décalé « Carnaval des Animaux », composé en catimini par un créateur dont le sérieux constituait le fond de commerce.

Les musiciens déchaînés et leur dompteur débonnaire

Débordant du simple cadre musical, les interprètes décidaient carrément de s’investir dans le comportement animal des personnages illustrés par la partition de Saint-Saëns. Jamais peut-être cette « Fantaisie zoologique » n’aura aussi bien porté son nom. Menés à la baguette par un dompteur énergique mais bonhomme (l’acteur et récitant Christian Brazier), nos chers musiciens s’égaient sur le plateau de l’auditorium de Saint-Pierre de Cuisines. Véritablement déchaînée, l’excellente flûtiste Sandrine Tilly révèle des talents insoupçonnés de mime simiesque. Grignotant sa partition, elle provoque ses collègues, jouant les tortues en compagnie de la pianiste Anne Le Bozec, tout aussi déjantée. Le percussionniste Christophe Dewarumez, devenu lion, le contrebassiste Damien-Loup Vergne, éléphant débonnaire, le clarinettiste David Minetti, coucou obsessionnel, construisent un véritable spectacle éclaté sans pour autant sacrifier en quoi que ce soit la qualité musicale. Ainsi, l’agitation se calme lors d’un aquarium magique et hypnotique, alors que la violoncelliste Sarah Iancu, devenue cygne immaculé, tient l’auditoire sous son charme. Un grand bravo au pianiste Philippe Monferran, aux violonistes Mary Randles et Olivier Amiel, à l’altiste Bruno Dubarry et à Christian Brazier, l’organisateur de cette folie festive.

Le vertige du dompteur aux prises avec la flûtiste Sandrine Tilly !

En guise de hors-d’œuvre, trois partitions du 20ème siècle étaient admirablement interprétées. L’Ouverture sur des thèmes juifs de Prokofiev alterne fatalisme, grotesque et lyrisme dans une atmosphère très « Europe centrale ». La « Technoparade », sorte de « perpetuum mobile » motorique pour flûte, clarinette et piano du jeune Guillaume Connesson, témoigne de son talent éblouissant de compositeur que les interprètes transcendent de leur virtuosité. Enfin, « L’Heure du berger » révèle un Jean Françaix étonnant, plein d’une élégance humoristique.
La 9ème saison des Clefs de Saint-Pierre s’ouvre donc sous les meilleurs auspices, ceux de musiciens en liberté.

Partager