Concerts

Incandescence

Certains concerts confirment ou infirment des talents reconnus. D’autres révèlent des personnalités musicales hors du commun. Ce fut vraiment le cas de cette soirée du 28 avril dernier au cours de laquelle l’Orchestre national du Capitole recevait deux artistes étonnants dont la rencontre a soulevé l’enthousiasme du public.

Le jeune chef d’orchestre danois Thomas Søndergård, chef principal et conseiller musical de l’Orchestre de la Radio norvégienne, dirige la phalange toulousaine avec une implication de tous les instants. Sans geste superflu, il est néanmoins habité par la musique. Dès l’ouverture de l’unique opéra de Robert Schumann, Genoveva, il obtient ce relief des sonorités qui permet à tous les pupitres de s’exprimer sans se fondre vraiment. Sa direction nerveuse, très différentiée, suscite les nuances les plus extrêmes. Chaque épisode de cette courte pièce se trouve ainsi fortement caractérisé.

La violoniste russe Alina Ibragimova et le chef d’orchestre danois Thomas Søndergård

© Classictoulouse

La violoniste russe Alina Ibragimova rejoint ensuite l’orchestre pour une interprétation particulièrement personnelle et intense du 2ème concerto pour violon de Mendelssohn. Cette très jeune musicienne renouvelle totalement l’approche de cette partition trop souvent édulcorée et adoucie. Soutenue par un orchestre qui joue vraiment le jeu, elle construit l’œuvre avec logique et détermination, conférant à chaque mouvement un caractère affirmé, dans un choix de tempi vifs et soutenus. L’Allegro appassionato initial s’ouvre sur une inquiétude fébrile et frôle même l’angoisse. La tendresse et le lyrisme discret de l’Andante ouvre la voie vers un final libérateur, exubérant, d’une joie débridée. La riche sonorité de la violoniste et sa technique irréprochable se jouent de toutes les difficultés de cette page juvénile. Signalons en outre que cette exécution a été malheureusement perturbée par le malaise d’une jeune flûtiste, stagiaire au sein de l’orchestre, qui dut être évacuée au cours du premier mouvement. Aux dernières nouvelles, la musicienne a bien récupéré. L’incident, s’il a évidemment ému les musiciens, n’a toutefois pas déstabilisé la soliste qui a dû reprendre le concerto après une courte interruption. Le succès public de son interprétation est tel qu’Alina Ibragimova ne quitte la scène qu’après un bis emblématique, splendidement joué, la Gavotte en Rondeau de la 3ème Partita en mi majeur de Johann Sebastian Bach.

Thomas Søndergård à la tête de l’Orchestre national du Capitole © Classictoulouse

C’est enfin dans la première symphonie de Jean Sibelius que la direction tendue et intense de Thomas Søndergård s’épanouit sur la durée, en même temps que dans l’instant. Le chef danois structure toute la partition avec une grande logique et un sens aigu de la progression dramatique. Après l’introduction sublimement éthérée que distille le solo de clarinette (excellent Francis Tropini), il aborde cette œuvre forte avec une intensité, une violence même, parfaitement justifiée et qui colle le spectateur au fauteuil dès l’Allegro energico du premier volet. Exit les brumes du nord. Les attaques sont franches, les arêtes vives, la couleur éclate avec des alternances de désespoir et d’extase. La profonde nostalgie qui ouvre l’Andante enchaîne sur un lyrisme intense qui se distingue clairement de celui d’un Tchaïkovski auquel on le rattache parfois de manière indue et malgré les dénégations de Sibelius lui-même. Le Scherzo trépigne de son rythme marqué, habilement souligné par la timbale qui joue là un rôle inhabituel et fort. Enfin, le final explose sous une lumière aveuglante. Comme une coulée de lave, l’orchestre incandescent enflamme tout le paysage. Petite anecdote : du fait de l’absence de la deuxième flûte, c’est Geneviève Laurenceau, premier violon solo de l’orchestre, qui se substitue à elle dans le beau duo qu’elle partage avec Sandrine Tilly, flûte solo. Probablement une grande première !

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