Concerts

Concertos baroques, virtuosité et raffinement

L'Orchestre Les Passions dans l'église Saint-Exupère - Photo Éric Cases -

Sous le titre générique « Concertos Baroques », Les Passions – Orchestre Baroque de Montauban présentait le samedi 23 mars en l’église Saint-Exupère un nouveau programme musical qui était redonné le lendemain au Théâtre des Quatre Saisons de Gradignan (33). Un bouquet de pièces était ainsi offert au public ébloui par ce déploiement de finesse et de brio.

Ce double concert était organisé dans le cadre de la Journée de Musique Ancienne du Réseau Européen des Musiques Anciennes et en partenariat avec le Goethe Institut de Toulouse à l’occasion de la Quinzaine Franco-Allemande. Dès l’ouverture de ce premier concert, la Directrice de l’Institut, Stefanie Neubert, ainsi que le Président de l’Orchestre Les Passions, Daniel Halm, se sont réjouis de cette collaboration.

Les compositeurs parmi les plus populaires de l’époque baroque animent le programme de cette fin d’après-midi. Jean-Marc Andrieu et ses complices choisissent les pièces qui exaltent le mieux les combinaisons offertes par la formation ainsi constituée. Violon, flûte à bec, hautbois, basson, violoncelle et clavecin sont tour à tour solistes des concertos proposés. La virtuosité, l’expression mélodique, l’humour aussi se manifestent tout au long de ce programme festif et varié, présenté par les musiciens eux-mêmes. Comme le fait remarquer Jean-Marc Andrieu, les six interprètes présents correspondent exactement au nombre de partitions abordées. Chacun d’entre eux présente donc une œuvre, au hasard celle dans laquelle il est particulièrement mis évidence ! L’humour est au rendez-vous.

Les musiciens. De gauche à droite : Jean-Marc Andrieu, Fabio Losco, Yvan Garcia, Etienne Mangot, Xavier Miquel et Nicolas André – Photo Éric Cases –

Ainsi se succèdent au premier rang : Flavio Losco, violon, Xavier Miquel, hautbois, Etienne Mangot, violoncelle, Nicolas André, basson, Yvan Garcia, clavecin et bien sûr Jean-Marc Andrieu à la direction et à la flûte à bec. Chacun n’hésite pas à affirmer que son instrument est, à l’évidence, le plus important de ce programme !… Cette rivalité simulée révèle, tout au long du concert, la profonde complicité musicale qui lie ces acteurs/interprètes. Chaque œuvre abordée révèle un dialogue, une série d’échanges qui prennent parfois l’allure d’un défi.

Présenté par Jean-Marc Andrieu lui-même, le Concerto en mi mineur pour flûte à bec, violon, hautbois, basson et basse continue, opus 37 n°6 de Joseph Bodin de Boismortier, un compositeur encore peu diffusé ouvre ce programme. Ses trois mouvements alternent les affects. A la suite de la danse du premier et à la douceur du deuxième, succède le troisième volet qui évoque une discussion virtuose entre les six instruments. C’est au bassoniste Nicolas André d’introduire la belle vitalité du plus célèbre des compositeurs de la soirée, Antonio Vivaldi, avec son Concerto en sol mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue, RV 105. Comme on pouvait s’y attendre le basson est ici en vedette avec un déferlement virtuose de l’instrument pour lequel le prêtre roux a composé le plus grand nombre de concertos (après le violon tout de même !). Le touchant duo avec la flûte constitue un moment musical particulièrement significatif de cette belle œuvre. Le retour vers Boismortier met en évidence l’art du violoncelle avec son Concerto en ré majeur avec cordes et basse continue, le tout premier composé en France pour cet instrument, dans une transcription de Jean-Marc Andrieu pour les instruments présents. Etienne Mangot, expert en la matière, en commente le déroulement et en souligne la séduisante éloquence.

Les musiciens dans une autre configuration – Photo Classictoulouse –

L’incursion dans la musique baroque allemande s’ouvre sur le Quintette en ré majeur pour flûte à bec, violon, hautbois, violoncelle et clavecin obligé WB 76, du plus jeune des fils de Johann Sebastian Bach, Johann Christian. Cette pièce d’un classicisme triomphant met en avant le jeu du clavecin tenu ici par Yvan Garcia qui se charge en outre de sa présentation. Un poétique mouvement central combine les pizzicati des cordes et les ponctuations du clavier qui s’échappe enfin de son rôle de continuiste. Le hautbois devient à son tour la vedette avec le Concerto en la mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue de Georg Philipp Telemann, commenté et joué par Xavier Miquel. La succession des quatre mouvements se conclut sur un déferlement virtuose, une sorte de combat impressionnant entre le hautbois et le violon.

C’est sur un retour à Vivaldi et le violon triomphant que se conclut ce programme vivifiant. Son Concerto en sol mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue, RV107 donne enfin à Flavio Losco l’occasion de s’exprimer, oralement et musicalement, sur l’art incomparable du compositeur. La Chaconne finale exploite les ressources les plus extrêmes d’un jeu “virtuosissime” du violon et de l’ensemble instrumental. Ce vertige éblouissant déclenche une ovation enthousiaste du public. La reprise comme bis de cette ultime séquence s’avère nécessaire. Jean-Marc Andrieu et ses musiciens y consentent avec la meilleure volonté !

Serge Chauzy

Programme du concert donné le 23 mars 2024 à 20 h en l’église Saint-Exupère de Toulouse :

  • Joseph Bodin de Boismortier : Concerto en mi mineur pour flûte à bec, violon, hautbois, basson et basse continue, opus 37 n°6.
  • Antonio Vivaldi : Concerto en sol mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue, RV 105.
  • Joseph Bodin de Boismortier : Concerto en ré majeur pour violoncelle, cordes et basse continue.
  • Jean-Chrétien Bach : Quintette en ré majeur pour flûte à bec, violon, hautbois, violoncelle et clavecin obligé WB 76.
  • Georg Philipp Telemann : Concerto en la mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue.
  • Antonio Vivaldi : Concerto en sol mineur pour flûte à bec, hautbois, basson, violon et basse continue, RV107.

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