Concerts

Fastes vénitiens

Lors de leur concert d’abonnement du 16 mars dernier, Les Arts Renaissants invitaient le prestigieux ensemble vocal « Cantus Cölln » et le groupe instrumental « Concerto Palatino ». Dans la belle église Saint-Jérôme, à l’acoustique parfaite pour ce large effectif, le luthiste Konrad Junghänel dirigeait un programme consacré à la plus prodigieuse production de musique sacrée que le dix-septième siècle ait dédiée à la cathédrale Saint-Marc de Venise.

Puisant dans le vaste recueil des quelques trente-sept pièces vocales et instrumentales de la « Selva morale e spirituale », publiée en 1647 par Claudio Monteverdi, Konrad Junghänel choisit ainsi une douzaine de numéros parmi les plus inspirés, pour recomposer une sorte de suite en forme de Vêpres. A l’image des célèbres « Vêpres de la Vierge » du même Monteverdi, cette « Vesper in San Marco », ainsi qu’elle est intitulée, déroule ainsi de sublimes fastes musicaux.

L’ensemble vocal « Cantus Cölln » et le « Concerto Palatino » sous la direction de Konrad Junghänel lors du concert toulousain du 16 mars 2011 – Photo Classictoulouse

L’ensemble vocal, constitué de huit chanteurs idéalement rompus à l’exercice, est ici associé aux six musiciens de cuivres anciens du « Concert Palatino » (deux cornetti et quatre trombones), à deux violons, un violone, un orgue positif, auxquels se joint par instants le luth de Konrad Junghänel lui-même. Virtuosité, précisions, couleurs, caractérisent ce subtil mélange dont l’équilibre reste parfait aussi bien sur le strict plan sonore que sur celui du style et de l’expression.

Un vaste portique ouvre la soirée sur le somptueux « Gloria a sete voci » dans lequel les interprètes ménagent de touchants contrastes comme celui qui introduit un « In Terra Pax » d’une infinie tendresse. La ferveur contagieuse de cette éblouissante entrée en matière se propage ainsi dans chacune des pièces de ces Vêpres.

L’exécution du « Dixit Dominus II » par l’effectif au complet aère la polyphonie complexe de cette pièce qui requiert et obtient une vocalisation parfaite de ses chanteurs. Saisissant contraste avec le « Salve Regina, a 2 voci » qui suit, tout imprégné de l’intime recueillement des deux voix de soprano dont les soupirs de douleur donnent les larmes aux yeux. Le deuxième « Salve Regina », à trois voix celui-là, suscite la même émotion, celle d’une prière désolée. De multiples dialogues ou échanges entre chœurs de voix ou chœur de voix et d’instruments structurent quelques unes des pièces les plus virtuoses de la suite. C’est le cas du « Deus tuorum militum secondo » dans lequel les voix masculines rivalisent avec la volubilité des cuivres, ou du « Laudate Dominum II » qui alterne voix solistes et tutti. La joie explosive du « Beatus vir Primo » bénéficie des prodigieuses guirlandes déployées par les cuivres et les violons en écho aux voix. Et puis comment ne pas évoquer la performance stylistique, virtuose et expressive du ténor solo Hans Jörg Mammel dans le « Salve Regina, Audi caelum », fervente prière en écho ? Un grand moment d’émotion. Le « Magnificat Primo » qui conclut la soirée rassemble toutes les forces musicales en un hymne solennel et vibrant. L’enthousiasme du public est tel que cette conclusion reste provisoire. Une nouvelle exécution d’un « Beatus vir » débordant d’énergie complète l’hommage à Monteverdi de l’un des plus beaux concerts de cette série.

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