Le cycle de lieder Winterreise (Voyage d’hiver), de Franz Schubert, fascine le monde musical et poétique depuis près de deux siècles. Les compositeurs eux-mêmes n’échappent pas à cette fascination. Le compositeur et chef d’orchestre allemand Hans Zender, né en 1936, est allé au bout d’une démarche étonnante fondée sur l’admiration. En 1993, il a réalisé une « interprétation composée » du célèbre cycle consistant à orchestrer la partition de piano avec les outils compositionnels de sa propre époque. Cette œuvre forte et grave est donnée au Théâtre du Capitole, dans le cadre des Présences Vocales, consacrées aux musiques contemporaines.
Il s’agit là de la quatrième manifestation de ce cycle passionnant des Présences Vocales qui rassemble les quatre institutions régionales que sont le Collectif éOle, Odyssud, le Théâtre du Capitole et du Théâtre Garonne. Après Written on skin, de George Benjamin, Luna Park, de Georges Aperghis, Dir – In dir, de Stefano Gervasoni, voici donc le Schuberts Winterreise, de Hans Zender. En 1827, un an avant sa mort, Franz Schubert, tout juste âgé de trente ans, offre au monde une œuvre qui sera érigé par la suite en monument de l’art du lied. L’émotion la plus authentique imprègne les vingt-quatre lieder de cette descente aux enfers, composés sur les touchants poèmes de Wilhelm Müller. Un enfer glacé auquel il est impossible de ne pas associer la fin proche et tragique du compositeur. Pudeur et douleur nourrissent cette succession d’atmosphères et d’états d’âme d’une incroyable profondeur expressive.
L’ensemble Klangforum Wien, dirigé par Emilio Pomárico
En 1993, Hans Zender décide de proposer sa propre version du cycle schubertien, afin de révéler au public d’aujourd’hui toute la fraîcheur, la variété des caractères, la force des contrastes, l’étonnement qu’ont pu éprouver les premiers auditeurs du cycle original. Pour cela, au piano génialement accompagnateur du chant est substitué un orchestre de vingt-quatre musiciens traité sans concession de manière contemporaine. Tout en respectant l’intégralité du texte original, cette entreprise de relecture offre le regard personnel du compositeur d’aujourd’hui sur ce Voyage d’hiver tout au long duquel s’expriment les émotions les plus intimes.
Hans Zender a fait ses études de piano, de direction d’orchestre et de composition dans le cadre des Musikhochschulen de Francfort et Fribourg-en-Brisgau de 1956 à 1963. Après un premier séjour comme boursier à la Villa Massimo de Rome durant l’année 1963-1964, il débute une carrière de chef d’orchestre en tant que directeur musical de l’Opéra de Bonn. Il occupe ce poste pendant quatre ans, avant de séjourner de nouveau à Rome en 1968-1969. Il est ensuite sollicité par l’Opéra de Kiel, puis de 1971 à 1984, dirige l’orchestre symphonique de la radio sarroise Rundfunk-Sinfonieorchester Saarbrücken avant de devenir directeur général de la musique à l’Opéra de Hambourg entre 1984 et 1987. Il a participé aux festivals de Bayreuth, Salzbourg, Berlin et Vienne.
Le ténor allemand Markus Brutscher, soliste de ce Schuberts Winterreise
Parallèlement à cette brillante carrière de chef d’orchestre, qu’il poursuit avec l’Orchestre de la Radio néerlandaise et le Théâtre de la Monnaie de Bruxelles, et, depuis 1999, comme invité permanent et membre de la direction artistique de l’Orchestre Symphonique de Baden-Baden et de la Südwest Rundfunk de Fribourg, Hans Zender mène une importante activité pédagogique. Il enseigne la composition de 1988 à 2000 à la Musikhochschule de Francfort.
Ce Schuberts Winterreise, de Hans Zender, sera interprété le 20 mars prochain au Théâtre du Capitole par le Klangforum Wien, orchestre de chambre viennois spécialisé dans la musique contemporaine, dirigé par le chef d’orchestre Emilio Pomárico, et chanté par le ténor allemand Markus Brutscher, un familier du répertoire du XVIIIème siècle, du baroque au premier romantisme, comme de Janáček, Richard Strauss et Kurt Weill.
