Pour son très attendu week end lyrique, le 42e Festival de La Vézère a invité, comme à son excellente habitude, la troupe britannique Diva Opera. Cette année, elle venait avec deux standards : Rigoletto de Giuseppe Verdi et L’Elisir d’amore de Gaetano Donizetti. Pour l’heure, en cette froide soirée du 4 août 2023, c’est, comme toujours, le chaleureux cocon de la Grange du Château du Saillant qui accueille les spectateurs impatients d’entendre cet opéra emblématique du compositeur italien.
L’ouvrage se donne sur une scène de 20 mètres carrés et avec pour unique accompagnement un piano tenu par le directeur musical et artistique de cette troupe, l’incroyable Bryan Evans. J’écris incroyable car, sans se départir de son sourire presque enfantin, ce musicien d’exception déroule avec une précision fabuleuse l’intégralité de la partition, sans temps mort aucun et avec toujours ce souci de coller au plus près de l’action. Une véritable performance qu’il convient de saluer en tant que telle. Sur scène, juste un trône, celui du Duc. C’est autour de lui et d’un praticable en forme de baldaquin, que se déroule la mise en scène signée Wayne Morris. Dans cet espace, vous en conviendrez, assez réduit, le drame va se nouer de manière imparable et nous prendre à la gorge. La proximité des interprètes et du public, conjuguée à l’indéniable talent scénique de toute cette troupe, nous font vibrer à ce drame sacrificiel avec une intensité dont nous sommes chaque fois, en ce lieu, les premiers surpris. Quelle que soit l’œuvre représentée d’ailleurs.
La distribution est sans faille remettant en cause la qualité globale de la représentation, chacune et chacun respectant à la note près une partition dont les difficultés sont majeures. Robyn Lyn Evans fait valoir avant tout une fougue échevelée et un caractère autoritaire dont il pare les envolées du Duc de Mantoue. Son ténor, certes un brin contraint dans l’aigu, est splendide de couleurs dans le médium et un grave d’une belle assise. La Gilda de Gabriella Cassidy impose sa voix de grand lyrique au suraigu parfaitement en place, déroulant un cantabile de belle facture avec beaucoup d’émotion. Philip Smith (Rigoletto) domine à l’évidence ce plateau par une interprétation dramatique de haute intensité et un abattage vocal de premier plan : voix ronde, homogène, musicale, phrasé ample et généreux, projection idéale pour ce lieu. Une ovation personnelle, et méritée, lui a été adressée. Mais il ne faudrait pas pour autant oublier le Sparafucile au creux impressionnant de la basse Timothy Dawkins, pas plus que le beau mezzo de Stéphanie Windsor Lewis (Maddalena) et le Monterone tellurique de David Stephenson. Saluons d’ailleurs l’ensemble des comprimari dont la qualité a contribué à l’excellente tenue de ce spectacle.
Robert Pénavayre
Crédit : 28mmphotos