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Le feu d’artifice des « Janequin »

Le deuxième week-end du festival gersois « Eclats de Voix » s’achevait, le 15 juin dernier, sur la joyeuse prestation de l’ensemble vocal « Clément Janequin ». Une belle occasion de fêter en public le trentième anniversaire de la fondation de ce formidable groupe de chanteurs hors norme.

L’ensemble vocal “Clément Janequin” © David Port

S’il est une sonorité vocale reconnaissable entre mille, c’est bien celle des « Janequin ». Le timbre unique de leur directeur musical, le haute-contre Dominique Visse, sonne comme une signature indélébile. Néanmoins, la sonorité ne constitue pas le seul élément identitaire de l’ensemble. La cohésion rythmique, la précision d’une diction habilement reconstituée, l’infinie justesse de ces voix mêlées nourrissent la vitalité unique de ses interprétations. Les « Janequin » savent s’approprier les œuvres qu’ils chantent tout en les respectant.

Ce 15 juin dernier, l’ensemble se produisait dans le charmant petit théâtre de l’hôtel de ville d’Auch, un lieu idéal pour une telle démonstration. Les « Janequin » réunissaient ce jour-là aux côtés de Dominique Visse, les barytons Vincent Bouchot et François Fauché, la basse Renaud Delaigue (qui joue aussi de l’orgue) et le luthiste et organiste Vincent Bellocq. Au cours de leur programme intitulé « Les plaisirs du palais » les cinq compères explorent le vaste répertoire de la chanson du 16ème siècle franco-flamand.

L’essentiel des plats relevés de ce menu musical illustre l’aspect coquin, leste, voire grivois des poètes et des compositeurs de cette époque, une époque à l’évidence libérée de tout complexe. Il n’est que d’écouter ces deux faces d’une même évocation, le « Beau Tétin » signé Clément Janequin lui-même, et le « Laid Tétin » de Clemens non Papa ! Les interprètes ne font qu’une bouchée de la musique, qui colle aux paroles, et des mots dont l’audace surprend toujours… Que dire de « Mon amy m’avoit promis… » de Ninot le Petit ? Personne ne sait mieux que Dominique Visse et ses complices en assumer les soupirs aussi suggestifs que musicaux. « La chasse du cerf » de Clément Janequin, dont les aboiements féroces ponctuent le déroulement, constitue aussi l’un des moments forts de cette galerie de tableaux haute en couleurs.

La nostalgie poétique émerge ici ou là avec quelques chants d’une absolue beauté, comme cette « Déploration sur la mort de Jean Ockeghem » du grand Josquin Despres. Quelle musique, mes amis !

Enfin, l’excellent luthiste Eric Bellocq ne se contente pas d’accompagner le chant avec grand talent. Deux pièces pour luth solo de Guillaume Morlaye lui permettent de déployer la plus chaleureuse des musicalités.

Un bon, un excellent anniversaire à cet ensemble irremplaçable et un grand merci à Patrick de Chirée, le directeur du festival « Eclat de Voix », pour l’avoir invité sur ses terres gasconnes.

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