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Et malgré tout, un véritable triomphe

Sous un mistral décoiffant et devant 8500 spectateurs (record battu pour un récital lyrique in loco), Natalie Dessay et Juan Diego Florez ont mis en émoi un amphithéâtre chauffé à blanc, une foule venue adorer d’incontestables icônes de l’art lyrique contemporain. Et pourtant…
Décidant au dernier moment de supprimer (?) de son programme le grand air d’Elvira d’I Puritani, de Bellini, Natalie Dessay, que nous aimons par-dessus tout, nous apparaît ce soir-là sensiblement en retrait par rapport à ses prestations passées. Le haut du registre semble devenir définitivement douloureux. Si la musicienne demeure souveraine, celle qui fut une Zerbinette d’anthologie n’aborde aujourd’hui le suraigu qu’avec beaucoup de précautions, voire de parcimonie. S’accrochant à des partitions (?) que le vent lui dispute régulièrement, Natalie Dessay accompagne son chant de mimiques gestuelles qui finissent par créer un malaise…

Et c’est d’autant plus flagrant qu’à ses côtés chante, avec une sobriété et une autorité sans appel, l’immense ténor péruvien Juan Diego Florez. Avec lui renaît la légende des Chorégies. Depuis le redoutable air d’entrée d’Arturo dans I Puritani jusqu’à l’incontournable scène de Tonio de la Fille du régiment de Donizetti, sans oublier l’indispensable aria de Nemorino de L’Elixir d’Amour, du même Donizetti, la perfection règne en maîtresse absolue. Ce phrasé ample et généreux, ce style au-dessus de tout soupçon, cet ambitus d’une parfaite homogénéité couronné d’un suraigu royal et d’une sûreté absolue, ce timbre dense et lumineux, chaud et captivant, charnu et fruité et cette simplicité permanente, sceau indéniable des grands chanteurs, tout cela c’est Juan Diego Florez. Sans parler de sa capacité incroyable à incarner un personnage dès les premières notes. Du très grand art ! Les Chorégies se devaient de le saluer au moins une fois. Saluons également comme il convient Raymond Duffaut pour l’avoir convaincu de tenter l’aventure du Mur Antique. Car c’est toujours une aventure !

Natalie Dessay, Juan Diego Florez et le Chef Giovanni Antonini (Photo : Ch. Lopez)

Sous la direction de Giovanni Antonini, spécialiste de l’époque baroque et directeur d’Il Giardino Armonico, l’Orchestre Philharmonique de Radio France affronte avec courage un mistral décidément très présent et trouve, particulièrement dans l’ouverture de la Norma de Bellini, des accents d’une très belle tenue.

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