Disques

Romantisme exaltant

Tchaïkovski et Dvořák étaient inscrits au programme de ce concert donné au cours du festival de Pâques d’Aix-en-Provence, le 5 avril 2018. Le directeur de ce festival, le violoniste Renaud Capuçon, avait réuni autour de lui le pianiste Lahav Shani et le violoncelliste Kian Soltani. L’enregistrement « live » de ce concert tout récemment publié témoigne du supplément d’âme qu’apportent les exécutions musicales en présence d’un public.

Associer Tchaïkovski et Dvořák, nés à un an d’écart, permet d’en mesurer les caractères communs mais également les différences. Les deux trios avec piano gravés ici représentent deux œuvres majeures du répertoire de musique de chambre de la période romantique. Les trois artistes réunis au cours de ce festival aixois s’investissent dans leur exécution avec une ardeur qui fait chaud au cœur. On ne présente plus Renaud Capuçon, dont la sonorité chaleureuse, la virtuosité naturelle, fait ici merveille.

Moins connu est Kian Soltani, violoncelliste autrichien, né à Bregenz dans une famille de musiciens persans. Il a occupé le poste de violoncelliste principal dans le West-Eastern Divan Orchestra de Daniel Barenboim. Quant au pianiste Lahav Shani, il est bien connu à Toulouse comme… chef d’orchestre ! Ce jeune musicien israélien, directeur musical des orchestres philharmoniques de Rotterdam et d’Israël, connait une ascension fulgurante. Ses apparitions toulousaines à la tête de l’Orchestre national du Capitole ont marqué les esprits.

Les trois compères animent le Trio en la mineur de Tchaïkovski avec une fougue impressionnante. Ils traduisent de manière convaincante cet hommage du compositeur à Nicolaï Rubinstein, l’ami fidèle, fondateur du Conservatoire de Moscou, disparu en 1881. Une puissante vague romantique parcourt les deux longs mouvements de cette partition de dimension symphonique. Les interprètes, tout en respectant la structure, les tempi, la cohésion de l’écriture, soulignent les sentiments douloureux, la mélancolie mais aussi la révolte que le compositeur n’a pas manqué d’y insuffler.

Avec son Trio n° 3, Antonin Dvořák semble suivre les pas de son ami Johannes Brahms. Sans pour autant renier ses profondes racines bohémiennes, le compositeur tchèque adopte les formes musicales venues d’Autriche et d’Allemagne. Ici aussi un deuil marque l’œuvre, celui de sa mère, et les quatre mouvements lui confèrent une dimension symphonique. La mélancolie, la tendresse alternent avec une fougue par moments irrésistible, notamment lorsque Dvorak s’inspire de la célèbre danse tchèque à trois temps, le furiant. Les interprètes exaltent le lyrisme profond de la partition avec une sincérité et une qualité sonore irréprochable.

La qualité technique de l’enregistrement doit également  être soulignée.

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