Créé en 2012 en hommage au plus grand violoniste russe du XXe siècle, le Quatuor David Oïstrakh s’est rapidement forgé une réputation d’excellence par la qualité technique de chacun de ses membres et la cohésion de son ensemble. Il est rejoint ici par deux musiciens de la même qualité afin d’explorer un répertoire moins disparate qu’il n’y paraît au premier abord.
Le Quatuor David Oïstrakh rassemble Andrey Baranov, premier violon, Rodion Petrov, second violon, Fedor Belugin, alto et Alexey Zhilin, violoncelle, tous reconnus et récompensés lors de grands concours internationaux. Deux musiciens supplémentaires, l’altiste Daniel Austrich et le violoncelliste Alexandre Buzlov complètent l’ensemble et constituent ainsi le sextuor destiné à rapprocher deux compositeurs aux spécificités apparemment bien différentes.
De Tchaïkovski, le sextuor Souvenir de Florence, composé en 1890 à la suite de son séjour dans la cité toscane, témoigne d’un héritage russe plutôt que d’une illustration liées à l’Italie. Les musiciens l’abordent ici avec une énergie irrésistible. Dès l’Allegro con spirito, l’intensité de leur jeu s’accompagne d’une cohésion parfaite. Cette lecture pleine et âpre n’exclut en rien une sorte de lyrisme douloureux tel qu’il s’exprime dans l’Adagio cantabile e con moto. L’Allegretto moderato exhale une nostalgie typiquement russe, malgré les épisodes animés, comme perturbateurs. Dans le final, Allegro vivace, le rythme de danse n’obère rien cette sorte de course à l’abîme qui le conclut. Soulignant les contrastes de la partition, les interprètes en exaltent les couleurs et la vitalité des rythmes.
Dans son sextuor Verklärte Nacht (La nuit transfigurée), composé moins de dix ans plus tard, Arnold Schönberg transpose une partie de l’héritage de Brahms dans un expressionnisme exacerbé. Illustrant le poème de l’écrivain allemand Richard Dehmel, cette partition en un seul mouvements n’aura que peu de suite dans l’œuvre ultérieure du compositeur. La tonalité avant l’atonalité y règne encore en maître. La version originale pour sextuor, gravée ici, précède une transposition pour orchestre à cordes assez souvent jouée en concert. Les interprètes en soulignent l’âpreté, voire la cruauté de certains passages, sans pour autant en gommer le lyrisme intense. Les premières notes, telles des ombres naissantes émergent du silence. Un silence dans lequel l’œuvre s’efface au final. D’inquiétants pizzicati, de subtils crescendos-decrescendos, une extrême dynamique sonore confèrent une vie frémissante à cette pièce complexe. On observe ici une légitime alternance entre angoisse et exaltation, telle que le poème l’exprime. La tension ne se relâche jamais jusqu’aux dernières mesures qui semblent se prolonger à l’infini.
Encore une fois, la qualité de ces deux prestations justifie largement le couplage inattendu !
Tchaïkovski : Souvenir de Florence
Schönberg : Verklärte Nacht
PRAGA Digitals – Réf. PRD 250 424
Enr. 2019 – Prix FNAC : 17,99 €