Concerts

Superbement viennois

Le grand Riccardo Muti était à la tête de l’Orchestre National de France lors du concert des Grands Interprètes du 15 mars dernier à la Halle-aux-Grains de Toulouse. Le programme de la soirée illustrait cette période bénie du classicisme viennois que les musicologues baptisent parfois la 1ère Ecole de Vienne, dont l’écho, au 20ème siècle sera cette 2ème Ecole de Vienne des Schönberg, Berg et Webern.

Le grand chef d’orchestre italien Riccardo Muti (Photo Silvia Lelli – EMI Classics)

Il s’agissait ici de célébrer Mozart et Haydn, le fils et le père spirituel, inventeurs des nouvelles formes musicales qui allaient irriguer toute la musique jusqu’à nos jours. La figure étrange de l’italien Antonio Salieri, viennois d’adoption, venait en quelque sorte compléter le tableau. La phalange française et le chef italien explorent ce répertoire raffiné avec une admirable perfection formelle. Souplesse d’une direction imaginative qui respire, rondeur des sonorités, pureté des timbres et des couleurs.

Très judicieusement, Riccardo Muti réunissait dans la première partie de la soirée les symphonies n° 39 de Haydn et n° 25 de Mozart, deux partitions délibérément inspirées du mouvement artistique « Sturm und Drang » (Tempête et Passion) de cette fin du 18ème siècle. Haydn ponctue la violence de ses emportements d’inquiétants silences que souligne avec art la dramatique direction de Riccardo Muti. La même véhémence anime la symphonie de Mozart qui avance dans une forêt d’événements musicaux magnifiquement détaillés par l’interprétation.

La symphonie n° 89, de Haydn qui conclut le concert, recentre le propos vers une plus grande sérénité. L’esprit et même l’humour de la maturité du compositeur y affleure à tout instant, comme dans le final jovial.
Enfin, la musique de ballet de l’opéra « Europa riconosciuta » d’Antonio Salieri, qui s’insère entre Mozart et Haydn, n’est peut-être pas tout aussi intégralement indispensable, mais elle recèle quelques pépites savoureuses, comme ce mouvement en pizzicato ponctué par un basson goguenard, ou encore ce splendide solo de hautbois qu’exécute avec une somptueuse perfection la soliste du National.

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