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La sublime parenthèse de Mahler

1899 – 1901, trois années qui nous révèlent un Gustav Mahler intimiste, touché par la grâce et bien éloigné des séismes dont il a ponctué ses compositions antérieures… et postérieures.
C’est sur des poèmes de Friedrich Rückert (1788-1866) que le grand musicien autrichien composa ce recueil de 5 lieder dans les tout débuts du 20ème siècle. Point de déclamation post-wagnérienne ici, mais plutôt une ligne vocale d’une grande pureté et d’une infinie douceur. L’accompagnement instrumental, d’un extrême raffinement, souligne l’apparente simplicité qui a présidé à la naissance de cette œuvre. Christine Schäfer est-elle l’interprète idéale de ce répertoire ? Oui, si l’on considère la musicalité et l’émotion qu’elle fait naître de sa voix de soprano. Il en est autrement quant à l’inadéquation manifeste entre la tessiture requise et celle de cette chanteuse. Ecrit pour baryton, ce recueil, parfois interprété par des mezzos, s’accommode difficilement d’une voix claire, de plus ici manquant parfois d’appui et surtout de projection dans le medium et le grave. Christine Schäfer est une interprète de théâtre, voir son incroyable Violetta et son non moins sidérant Chérubin. L’exposer ainsi était meurtrier, malgré toute l’attention de Christoph Eschenbach.

Le chef d’orchestre Christoph Eschenbach

La 4ème symphonie de Gustav Mahler est loin d’être la plus programmée. Composée durant les mois d’été de 1899 et 1900, elle fait partie des opus symphoniques les plus courts (moins d’une heure) de ce compositeur. Encadrée chronologiquement par la prométhéenne 3ème (1h30) et la tellurique 5ème (70 minutes), elle a d’abord porté le titre d’ «humoresque ». Bruno Walter la qualifiait de conte de fées ou bien encore d’évocation de Haydn. L’orchestre requis ne comporte ici ni trombones ni tuba, donnant ainsi à l’ensemble une grâce et une élégance propres à cette évocation de l’enfance souhaitée par Mahler. Mais attention, nous sommes loin d’une symphonie des jouets, l’ambivalence règne du début à la presque fin, cette dernière faisant appel à un extrait du recueil « Des Knaben Wunderhorn » (le Cor enchanté de l’enfant) permettant à cette œuvre, au-delà de toutes les allusions et grimaces malveillantes qui ont pris place dans les quatre premiers mouvements, de s’achever dans le rêve d’une vie éternelle. Christine Schäfer rencontre fatalement toujours les mêmes problèmes dans cet ultime lied. Par contre, le moment est venu de saluer, bien sûr l’Orchestre de Paris et plus particulièrement son violon solo Roland Daugareil, extrêmement sollicité dans cette partition, mais aussi et surtout Christoph Eschenbach. Dirigeant sans partition, il donne à cette symphonie une intensité et une dynamique qui amènent l’auditeur au bord du ravissement. Suspendant au bout de sa baguette et pendant de longues secondes les applaudissements du public, il transforme de facto le final de cette symphonie en une longue prière ouvrant une porte vers le merveilleux. Inoubliable !

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