DECCA ne pouvait imaginer lorsque le présent album a été mis en vente il y a quelques semaines, que ce serait aussi un hommage in memoriam à cette immense figure de l’art lyrique du 20ème siècle. En effet, Carlo Bergonzi a tiré sa révérence au monde des humains le 25 juillet dernier, dix jours exactement après avoir fêté son quatre-vingt dixième anniversaire.

Avec lui disparaît le dernier représentant d’une époque, celle qui vit émerger après le dernier conflit mondial des géants comme Jon Vickers, Franco Corelli et Mario del Monaco, pour ne citer que la gent ténorisante. Ses partenaires font aussi partie de cette légende, elles ont pour nom Renata Tebaldi, Renata Scotto et Joan Sutherland. Bien d’autres auront le privilège de chanter à ses côtés et d’enregistrer également des versions aujourd’hui encore de référence.

S’il débuta baryton avec le Figaro du Barbier de Séville, mais aussi Marcello et Rigoletto, sa voix va rapidement monter et lui ouvrira les portes du répertoire de ténor. Cela dit, son timbre restera étroitement lié à sa tessiture originelle et gardera des harmoniques sombres et une rare franchise d’émission dans le medium et le grave. Sa carrière prendra rapidement un envol international et les plus grandes scènes du monde vont se disputer cet artiste pendant près un demi-siècle. Si l’on ne recherchait pas forcément Carlo Bergonzi pour ses talents scéniques, ce chanteur était par contre unique en matière d’élégance vocale. Son art s’appuyait sur un phrasé aussi souple que long lui permettant de nuancer à l’infini sur une même phrase. Un appui phénoménal et un contrôle du souffle exceptionnel étaient les garants d’attaques imparables et d’un legato qui rendait pleinement justice à son compositeur de prédilection : Giuseppe Verdi. Le présent album nous le fait entendre dans Don Carlo, Rigoletto, Otello, Aïda, La traviata, Il trovatore mais, surtout et avant tout dans Un ballo in maschera. Pas un Riccardo, sur scène comme au disque, n’a approché le miracle de son interprétation. Le grand style à l’état pur ! Une leçon, y compris pour les plus célèbres d’aujourd’hui. Giacomo Puccini fut également l’un des grands musiciens qui bénéficia de son talent. Nous le retrouvons ici dans La Bohème, Madama Butterfly, Tosca et Manon Lescaut. Le panorama de ce double album, forcément incomplet car le répertoire de ce ténor comptait pas moins de 60 rôles, comprend aussi Cavalleria rusticana, Pagliacci, La Gioconda et Adriana Lecouvreur, toutes œuvres appartenant au répertoire dit vériste, avec les trivialités vocales que cela sous-entend, mais ici chantées avec un goût, une musicalité et un raffinement dans la ligne de chant qui rebattent largement les cartes des idées préconçues.

Enregistrés entre 1958 et 1975 pour un Otello qui ne fut jamais à son répertoire, ces extraits d’intégrales ou de récitals sont le témoignage de ce qui s’est fait de plus rigoureux, châtié, authentique, souverain en matière vocale au 20ème siècle. A méditer autant par les chanteurs que par le public…

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