Livres

Une bouleversante confidence

Jean Nainchrik - Photo: Mélanie Avanzato

Après Bruno et Jean, voici… Jean et Léo. Les premiers payèrent de leur vie, sous Louis XV, leurs amours interdites.  Pour les seconds, nos contemporains d’après-guerre, il n’en fut pas de même. Quoi que… Jean et Léo se rencontrent durant leurs études. Ils ont dix-sept ans. Un seul regard suffit pour que l’Ange blond comprenne que l’Ange brun sera l’homme de sa vie. Et réciproquement. Léo, qui n’aime que les femmes et Jean, qui est un homme. Le hasard va les emmener en voyage d’études en Italie. Rimini puis Venise. Leur professeur les a logés dans la même chambre. Dans le cœur de Jean, ces nuits italiennes vont s’inscrire au fer rouge.  Une révélation dionysiaque, un moment premier pour chacun, inoubliable, qu’ils ont partagé.  Jean chérit de tout son cœur cette sensation de revenir d’un pays qui n’avait jamais existé sur la carte de ses désirs. Puis plus rien. Léo a disparu ou, du moins, ne donne plus de nouvelles. Jean saura plus tard, trop tard, qu’il est parti photographe de guerre dans le désert du Sinaï. Une lettre s’est perdue… Malgré l’interdiction de l’homosexualité toujours d’actualité dans cette France des années 70 du siècle dernier*, elle aurait pu tout changer. Ce ne fut pas le cas. Jean rend visite à la mère de Léo. Moments suspendus au cours desquels tout un avenir radieux est réduit en cendres. Elle lui donne l’Etoile de David que Jean avait perdue en Italie, ce shadaï que portait Léo mais qui n’a pas empêché le feu guerrier de supprimer sa jeune vie.

Cette confidence se double d’une autre découverte, celle de la paternité de Léo qui nous transporte dans la France occupée qui persécute les Juifs.

Dans ce roman personnel, le premier de Jean Nainchrik, agent de stars et producteur à succès, c’est toute une époque récente qui nous saute aux yeux, avec ses implacables horreurs et ses hypocrites contraintes. Ce livre se lit d’une traite, à l’image d’un profond soupir, celui d’un regret qui n’aura pas de fin. L’émotion est au bout de chaque ligne, au cœur de chaque mot, des mots dont la simplicité de forme dit tout d’une poignante sincérité. Bouleversant !

Robert Pénavayre

  • La dépénalisation de l’homosexualité en France date du 4 août 1982

« Tu m’as volé mon étoile » roman de Jean Nainchrik – Editions Récamier – 161 pages – 18.90€

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