Christophe Ghristi fait entrer au répertoire du Capitole la version italienne du Mefistofele d’Arrigo Boito (1842-1918).
Créé à la Scala de Milan le 5 mars 1868, sur un livret du compositeur lui-même, cet opéra connaît un échec retentissant. Alors en 5 actes plus un Prologue et un Epilogue, il débute à 19h30 pour se terminer à 1h30 du matin ! Qui plus est, les commentateurs de l’époque nous disent que la distribution n’est pas formidable… Comble de tout, c’est Arrigo Boito qui dirige. Ce qui ne fut jamais son fort. Résultat, Mefistofele est retiré prestement de l’affiche et le compositeur se remet à l’ouvrage, l’œuvre lui tenant particulièrement à cœur. Remaniant et réduisant considérablement la structure du livret, il présente sa nouvelle version au Communale de Bologne le 4 octobre 1875. Un autre chef, une bien meilleure distribution et, au passage, le rôle de Faust quitte la clé de fa du baryton pour rejoindre celle en sol du ténor. Le succès est au rendez-vous et c’est bien sûr cette version qui sera dès lors retenue. Sans pour autant faire de cet opéra une œuvre du grand répertoire des théâtres lyriques. Et pourtant que de splendeurs et un formidable rôle-titre. Sans oublier une partition chorale insensée !
Bien sûr, Arrigo Boito est entré dans l’Histoire avant tout pour sa collaboration avec Giuseppe Verdi (Falstaff et Otello). Deux chefs-d’œuvre absolus ! Par deux fois il fit « raisonner le colosse de bronze ». A l’égard de ce compositeur, il eût des mots sans appel : « La servitude volontaire que j’ai consacrée à cet homme juste, noble entre tous et vraiment grand, est l’acte de ma vie dont je me félicite le plus ».
Entrée au répertoire du Capitole le… 13 décembre 1968
Pour célébrer le centenaire de la création de cet opéra, c’est Gabriel Couret, alors directeur de l’illustre maison, metteur en scène de ce spectacle, qui fait véritablement entrer au répertoire capitolin le chef-d’œuvre d’Arrigo Boito, mais en français, comme cela est souvent de coutume il y a un demi-siècle. Cette version française est signée Paul Milliet (1848-1924). C’est à la basse Jacques Mars, illustre entre toutes, que Gabriel Couret confie le rôle-titre. A ses côtés le ténor Georges Liccioni (1932-2013) chante Faust, la soprano Jacqueline Brumaire (1931-2000) Marguerite et Hélène. A la baguette, un jeune chef tout récemment arrivé dans la Ville rose et qui va faire parler de lui : Michel Plasson. Il a alors 35 ans. Jean Dupouy, Yvonne Dalou et Claude Noves complètent cette distribution. Saluons aussi Guy Lhomme, chef des Chœurs qui réunissent non seulement ceux du Théâtre, mais également les Chorales Clémence Isaure et Paul Vidal ainsi que les Elèves de la Classe d’Ensemble Vocal du Conservatoire.
De Méphistophélès à… Mefistofele
Il fallait bien qu’un jour cette adaptation du célèbre Faust de Goethe arrive, dans sa langue originale lyrique transalpine, sur les bords de notre Garonne. En un Prologue, 4 actes et un Epilogue, Arrigo Boito s’inscrit dans la lignée des musiciens (Gounod, Berlioz, Busoni, Schumann) qui sont tombés sous le charme de ces deux pièces de théâtre passées dans l’inconscient collectif sous le titre unique de Faust. Arrigo Boito écrit un livret qui fait référence aux deux ouvrages. De plus ou moins loin s’entend. L’opéra est plutôt une suite de scènes dont la trame générale développe l’étrange destinée du docteur Faust et de sa belle Marguerite. Sans oublier celui qui est ici le personnage central, celui qui n’aime pas la lumière, l’un des sept princes des Enfers : Méphisto.
Ce spectacle nous arrive tout droit de Wallonie où il fut créé en 2007 à l’Opéra royal dans la mise en scène de Jean-Louis Grinda, alors directeur de ce théâtre. Il sera dirigé par un nouveau venu dans la fosse capitoline, le maestro italien Francesco Angelico, un maestro dont le répertoire alterne régulièrement bel canto et … Wagner ! Le casting va nous faire découvrir la cantatrice italienne Chiara Isotton, une véritable lirico-spinto pour Marguerite. Nous retrouverons avec mille bonheurs Béatrice Uria-Monzon dans le rôle d’Hélène et Jean-François Borras dans celui du Docteur Faust. Last but not least, c’est Nicolas Courjal qui vient prendre au Capitole possession du rôle de Mefistofele, un rôle convenant comme un gant à ses talents d’artiste lyrique, un rôle marqué dans l’Histoire par Fédor Chaliapine et Boris Christoff. Gabriel Bourgoin dirigera le Chœur et la Maîtrise de l’Opéra national du Capitole pour cet ouvrage qui va mettre les deux phalanges au premier plan de ce spectacle.
Robert Pénavayre
Date des représentations : 23, 25, 27 et 30 juin, 2 juillet 2023
Renseignements et réservations : www.theatreducapitole.fr