La Maîtrise de Toulouse, créée en 2006 au sein du Conservatoire de Toulouse et dirigée depuis par son fondateur expert en la matière, Mark Opstad, poursuit sa démarche d’enregistrements discographiques. Au rythme régulier d’un album tous les deux ans, ce chœur de jeunes chanteurs explore les répertoires les plus divers. Il réunit ici deux œuvres sacrées presque contemporaines de deux compositeurs proches par l’esprit, le Suisse Frank Martin et le Français Maurice Duruflé.
Rappelons que cette première structure maîtrisienne du sud-ouest de la France a rapidement atteint un niveau de qualité tel qu’il lui a permis de recevoir, en 2017, le 27ème Prix Liliane Bettencourt pour le Chant Choral – édition spéciale maîtrises et chœurs d’enfants. Cette prestigieuse récompense confère à ce chœur une séduction et une autorité exceptionnelles que ses prestations successives ne cessent de confirmer, aussi bien par ses concerts publics que par ses enregistrements.
« L’épatante Maîtrise de Toulouse… », telle que la qualifie Diapason Magazine, aborde cette fois le répertoire sacré du XXème siècle sous un angle nouveau et rarement exploré. La Messe pour double chœur de Frank Martin et le Requiem de Maurice Duruflé sont ici chantés dans des versions originales peu diffusées.
La Messe pour double chœur a cappella de Frank Martin, une œuvre d’une grande complexité, est restée complètement inconnue pendant près de quarante ans. Composée en 1922 et remaniée à plusieurs reprises, elle bénéficie ici des qualités vocales et profondément musicales que Mark Opstad insuffle à ses chanteurs. Les cinq parties de l’ordinaire de la messe qui se succèdent évoquent une intériorité sacrée, une intimité touchante qui frappent immédiatement dès le développement des mélismes caractéristiques du Kyrie. L’ineffables pureté des timbres de ces jeunes chanteurs, la finesse subtile des nuances et des phrasés dictés par Mark Opstad alternent avec une ferveur exprimée avec conviction et mesure. De l’Agnus Dei final émane une douceur céleste. A signaler la belle spatialisation de l’enregistrement réalisé dans le Temple du Salin à Toulouse. La perception sonore du double chœur constitue une plus-value indéniable.
Contrairement à la Messe de Frank Martin, le Requiem de Maurice Duruflé est régulièrement inscrit aux programmes des concerts comme à ceux des albums discographiques, mais la plupart du temps dans sa version orchestrale et avec des voix plus mures. Néanmoins, cette version avec orgue et jeunes voix, publiée en 1961, était très appréciée du compositeur. Souvent associée au Requiem de Gabriel Fauré qui emprunte les mêmes voies (et les mêmes voix !), cette version ici enregistrée mérite le même aphorisme de « Berceuse de la mort », souvent invoqué pour la partition de Fauré. Dans ces deux messes de Requiem, le Domine Jesu Christe et le Libera me intègrent la voix de baryton, ici Alain Buet, sombre de timbre vocal. Le Pie Jesu est réservé à la soprano ou mezzo-soprano, ici la lumineuse Juliette Mey dont on ne cesse de découvrir la beauté du chant. Son duo avec le violoncelle de Jérôme Cuvillier évoque une touchante confidence. On admire également les sonorités boisées de l’orgue du Temple du Salin tenu avec finesse par William Fielding.
Cette très belle parution chez Regent constitue un jalon supplémentaire dans la démarche artistique spécifique de la Maîtrise de Toulouse, ainsi que dans la divulgation de versions rares de grandes œuvres sacrées.
Album CD Regent – REGCD 557