Festivals

Andromaque dans la fournaise

Au sens propre comme au figuré, la résurrection de l’opéra de Grétry a enflammé la salle de l’Opéra Comédie, à Montpellier, où se déroule chaque année le festival de Radio-France et Montpellier Languedoc-Roussillon. On connait l’acharnement gourmand de René Koering pour les découvertes ou les redécouvertes. Il avait choisi cette année deux ouvrages oubliés dont cette Andromaque d’André-Ernest-Modeste Grétry, l’autre étant le « Wuthering Heights » de Bernard Herrmann.

Diffusée en direct sur France-Musique et en simultané avec l’Union Européenne de Radio-Télévision, la deuxième des représentations de cet ouvrage, le 13 juillet dernier, s’est donc déroulée dans la très charmante salle de la Comédie, parfaitement adaptée à l’envergure de l’ouvrage, mais hélas, ce soir-là, privée de son système de climatisation. Les touffeurs tropicales n’ont en rien limité l’enthousiasme des interprètes, ni celui du public, particulièrement heureux de la découverte.

Tassis Christoyannis (Oreste) et des membres du Vokalensemble de Stuttgart

@ Marc Ginot

Il est vrai que l’originalité de cet opéra surprend et réjouit. Tel un chaînon manquant entre Lully et Gluck, Grétry n’est pas particulièrement célébré pour ses tragédies lyriques. La trentaine d’ouvrages lyriques que l’on connaît de lui (le plus souvent, seulement de nom !) n’encombre pas les salles. En outre, à part Zémire et Azor, ou encore Céphale et Procris, quel titre vient à l’esprit lorsqu’on évoque son nom ? Mais voyons, Richard Cœur de Lion, bien sûr, pour une raison, il est vrai, bien indirecte ! Le fameux air « Je sens mon cœur qui bat qui bat… », cité dans La Dame de Pique, de Tchaïkovski, est plus souvent entendu que tout le reste de l’ouvrage.

Avec Andromaque, Grétry tourne le dos à la comédie légère. Sur les vers de Racine, quelque peu aménagés par Louis-Guillaume Pitra, le compositeur a écrit une musique qui colle aux mots. Une musique nerveuse, acérée, réactive au drame que le librettiste a voulu plus concentré, plus concis que la tragédie éponyme. Seuls quatre personnages se débattent dans les méandres amoureux et politiques de ce lendemain de guerre de Troie : autour de la veuve d’Hector, la belle Andromaque, gravitent, en quête d’amour, le roi Pyrrhus, Hermione et Oreste. Exit les confidents, confidentes et personnages secondaires. Les couples se font et se défont, mais le rôle le plus frappant est finalement celui tenu par le chœur : un véritable chœur antique, agissant, commentant, totalement intégré à l’action.

Sébastien Guèze (Pyrrhus) et Judith van Wanroij (Andromaque) @ Marc Ginot

Les musiciens du Concert Spirituel, le SWR Vokalensemble de Stuttgart, placés sous la direction d’Hervé Niquet font des merveilles. L’instrumentarium baroque de l’orchestre vif et acéré, animé de main de maître par Hervé Niquet, donne un relief étonnant, une saveur particulière à toute l’œuvre, alors que les voix du chœur s’imposent au même titre que celles des protagonistes.

La soprano Judith van Wanroij incarne une Andromaque sensible, émouvante, au timbre lumineux, alors que Maria Riccarda Wesseling prête à la bouillante Hermione sa voix chaude de mezzo-soprano. Le jeune ténor Sébastien Guèze déploie une énergie louable, claironnante même, dans le rôle de Pyrrhus et Tassis Christoyannis est un Oreste tragique bien caractérisé par la noirceur d’un timbre riche.

Dans le décor unique et les beaux costumes de Jean-Pierre Vergier, Georges Lavaudant a conçu une mise en scène efficace et symbolique qui donne à l’ouvrage toute sa force. Il doit être remercié pour avoir évité les « relecture actualisée » et autres transpositions historiques devenues de nos jours tellement « tendance ». Grétry, tout simplement un nom à ajouter au panthéon des grands compositeurs d’opéra !

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