DVD

Un plateau de stars, certes…

      L’affiche est plus qu’alléchante. Imaginez un peu : le ténorissime rossinien Juan Diego Florez, la nouvelle étoile des coloratures : Diana Damrau et un metteur en scène de légende : Nikolaus Lehnhoff. Le résultat n’est clairement pas au niveau des attentes.   A vrai dire, le ténor péruvien affiché dans le Duc avait surpris, pour le moins, les plus inconditionnels de ses fans. A juste titre d’ailleurs. Ce magnifique artiste n’a pas la carrure vocale de ce rôle. Il n’en possède pas l’assise dans le medium et le grave, pas plus que la dynamique et l’ampleur. Appuyant démesurément, il met en péril son vibrato et, chose tout aussi grave, ses aigus ! Et il est peu de dire qu’il est totalement étranger au style de cette production. Fort intelligemment, Juan Diego Florez annula immédiatement après tous ses autres engagements dans ce rôle. A ses côtés, Diana Damrau, somptueuse technicienne et musicienne, nous gratifie d’une vraie leçon de chant, mais d’un chant aux antipodes d’un bel canto toujours très présent sous la plume de Verdi en ce milieu du 19ème siècle. Sa Gilda manque également de sincérité, la comédienne se révélant particulièrement sommaire. Le Bouffon de ce spectacle n’est autre que le baryton serbe Zeljko Lucic. Avec cet artiste, nous revenons à Verdi. Archétype de la voix souhaitée par le compositeur, Zeljko Lucic en a le grain dense, la couleur sombre sans trop, la puissance de projection sur un ambitus qui se déploie avec panache jusque sur des aigus spectaculaires dans lesquels de somptueuses harmoniques barytonnantes affirment bien l’authenticité de cette voix. Habile comédien, fin musicien, usant d’un phrasé souverain, cet artiste s’est affirmé depuis quelques années comme l’interprète de référence de ce répertoire. Les seconds rôles sont d’un bon niveau, particulièrement le caverneux et impressionnant  Sparafucile de la basse allemande Georg Zeppenfeld.La mise en scène de Nikolaus Lehnhoff, dans les décors de Raimund Bauer et les costumes de Bettina Walter, nous plonge dans un univers cauchemardesque, celui d’une cour de Mantoue transformée en zoo, le temps d’un bal qui pourrait être celui des vampires, ces courtisans vivant au crochet du maître des lieux. Un temps cependant va donner un peu de lumière à ce monde de la corruption morale, ce sera celui de la rencontre entre Gilda et le faux Gualtier Maldé. La fille de Rigoletto est quasi retenue prisonnière dans un univers d’un bleu aveuglant de signification, tout comme la robe de mariée dans laquelle le Duc en fera sa maîtresse. A mi-chemin entre le rêve surréaliste et le musée des horreurs, cette production contient toute la noirceur d’une partition qui compte parmi les plus violentes de Giuseppe Verdi. Fabio Luisi, à la tête du Staatskapelle de Dresde (excusez du peu !) en donne une version musicale littéralement somptueuse.

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