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Un Lohengrin de belcantistes

      Il n’est que de regarder le répertoire de la soprano Anna Netrebko et du ténor Piotr Beczala pour comprendre que nous assistons avec eux à une véritable OPA italo-lyrique sur Wagner. Chantant pour la première fois Elsa et Lohengrin, ces deux interprètes, au cœur de leur carrière aujourd’hui, ont construit cette dernière en particulier sur trois compositeurs qu’ils ont magnifiquement illustrés : Verdi, Puccini et Donizetti. A vrai dire, et pour l’instant, cet opéra wagnérien est le seul qui soit à leur portée, sans perdre de vue Les Maîtres Chanteurs dans lesquels Piotr Beczala s’est aventuré il y a une vingtaine d’années. O Ce mois de mai 2016 est donc, à Dresde, une étape importante dans l’interprétation de cette œuvre dont l’italianité ne fait aucun doute. Si la reprise d’une production signée Christine Mielitz porte sur elle son quart de siècle d’existence et a pour seul mérite de ne gêner en aucune manière les chanteurs, tout l’intérêt de ces représentations réside dans la distribution et bien sûr dans la fosse. En effet, sous la direction de Christian Thielemann, la fameuse Staatskapelle de Dresde déploie des trésors de sonorités et de nuances, de phrasés et de dynamisme, de couleurs et de virtuosité. Rarement il nous a été donné d’entendre un pareil Prélude du 1er acte, comme un écho descendant directement de Montsalvat. Un moment d’une poignante émotion. Soulignons immédiatement la formidable tenue des phalanges chorales de cet opéra comptant parmi les plus prestigieux d’Europe. Disons tout de suite que le couple Elsa/Lohengrin a trouvé dans ces deux chanteurs, rompus au style bel cantiste, des interprètes de choix. On admire le phrasé élégiaque et l’émission en permanence sous contrôle du ténor polonais. Et quelle intensité dans ses expressions, un vrai personnage à la frontière entre l’humain et le divin. Une composition autant vocale que dramatique époustouflante et… neuve. Il y a fort à parier, et à souhaiter, que le soprano austro-russe peaufinera dramatiquement son Elsa, pour l’instant rudimentaire, mais d’ores et déjà d’une splendeur vocale inouïe. Le couple maléfique est somptueux à tous les points de vue. Il en est ainsi du Telramund tellurique de Tomasz Konieczny et de l’Ortrud démoniaque autant que volcanique d’Evelyn Herlitzius. Georg Zeppenfeld impose un Henri d’une noblesse vocale indiscutable. Excellentes interventions de Derek Welton, membre – luxueux – de la troupe du Deutsche Oper Berlin, dans le rôle du Héraut.Une belle captation qui rebat les cartes de l’interprétation de cette œuvre.

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