Presque trente ans après, il est toujours aussi difficile de mesurer l’impact de cette Tétralogie wagnérienne qui enflamma le monde de l’art lyrique, depuis la Colline Sacrée de Bayreuth. Au pupitre, Pierre Boulez, à la mise en scène, Patrice Chéreau, sur scène quelques uns des meilleurs interprètes de cette époque. Faite pour commémorer le centenaire de la création de l’œuvre (1976), cette production révolutionnera non seulement la vision de cet ouvrage titanesque (14 h de musique !), mais aussi toute une génération de jeunes metteurs en scène qui ont vu en Patrice Chéreau le fondateur d’une nouvelle école théâtrale, loin des archétypes et des traditions, plus au cœur des messages éternels légués par les artistes, Wagner en l’occurrence, qu’au service d’anecdotes dont la définition même sous-entend la brièveté. Pierre Boulez, à l’égal d’un Karajan, l’analyse en plus, faisait alors entendre un Wagner d’une incroyable fluidité, délesté de toute lourdeur, dont les couleurs et l’alchimie des timbres semblaient évidentes pour la première fois. D’un casting superlatifs, quelques noms émergeaient tout de même. Tel celui de cette immense tragédienne lyrique que fut Dame Gwyneth Jones, Brünnhilde quasi incandescente , vertigineuse de beauté comme de féminité, le pathétique et ô combien émouvant Wotan de Donald McIntyre, le sculptural Siegmund de Peter Hofmann, Heinz Zednik, aujourd’hui devenu Mime et Loge de légende, l’impressionnant Fasolt du gigantesque Matti Salminen, le terrifiant Alberich d’Hermann Becht. Il faudrait citer l’intégralité de cette distribution hors norme Le présent coffret est plus que le bienvenu. Il constitue le témoignage unique de l’une des dates les plus importantes de l’Histoire de l’Opéra.
