DVD

Un chef d’œuvre oublié

        Mettre à l’affiche une œuvre de la prime jeunesse d’un compositeur est un vrai challenge, même s’il s’agit d’un musicien de 20 ans répondant au nom aujourd’hui fameux de Rossini. La confier à Jean-Christophe Spinosi est déjà une garantie d’authenticité et de talent, lui adjoindre pour la production le vidéaste Pierrick Sorrin relevait pour le coup de la plus folle témérité. Et pourtant c’est ce que réalisa le Châtelet  en janvier 2007 et c’est ce spectacle qui arrive sur nos platines DVD. Incompréhensiblement disparue des programmes de nos théâtres lyriques, cette « Pierre de touche », ici donnée sur instruments d’époque par l’Ensemble Matheus et dans la dernière édition critique disponible, révèle toute la complexité musicale de Rossini, une complexité qui, de l’aveu même de Spinosi, en fait l’un des compositeurs les plus difficiles à diriger en termes de nuances et de dynamique. Déjà dans cet ouvrage, toute la mécanique high tech de ce génie est en place. Et c’est peu de dire que le duo Giorgio Barberio Corsetti et Pierrick Sorrin, chargé tout à la fois de la mise en scène, de la scénographie et de la vidéo, nous entraîne irrésistiblement et délicieusement dans l’univers de la technologie du 21ème siècle. Entre caméras multiples, incrustations hilarantes, effets spéciaux et gros plans révélateurs, cette production, véritablement originale, a du rythme, du sens et de la profondeur. Elle permet une approche quasiment « clinique » des personnages, ce qui, pour une intrigue visant à sonder le cœur des hommes, est loin d’être dépourvu de cohérence. Une réussite parfaite.S’il n’y a pas de stars dans le casting, je vous rassure, cela n’enlève rien au remarquable niveau lyrique de cette représentation filmée en direct. Tout ce petit monde connaît son Rossini sur le bout des doigts et l’interprète avec une habileté et une subtilité autant vocale que scénique susceptible d’attirer tous les suffrages, même des plus exigeants.Un vrai coup de cœur.En bonus, un entretien particulièrement éclairant de Jean-Christophe Spinosi ainsi qu’un court métrage signé Pierrick Sorrin  assez… décoiffant.

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