Œuvre emblématique du célèbre Festival de Glyndebourne qui la ressuscita en… 1962, puis lui offrit une reprise en 1984 avant les présentes représentations captées en juin 2008, cette Incoronazione, créée en 1643, est une œuvre magistralement moderne. Le livret de Busenello est d’une violence rare, n’hésitant pas à mettre en avant des personnages formidablement déplaisants et ambigus, où il n’est ici question que de sexe et de trahison, de travestis et d’orgies. La partition, comme beaucoup d’autres du 17ème siècle, alimente toujours des hordes de musicologues tant il semblerait qu’elle fut écrite à plusieurs mains. Peu importe car le résultat est royal. Ultime ouvrage lyrique d’un compositeur de 75 ans, cette Incoronazione s’adresse avant tout à un large public et, de fait, privilégie le théâtre et les personnages dans le vérisme de leur relation.La distribution de Glyndebourne 2008 nous offre un plateau somptueux. Et l’on ne sait qui admirer le plus. L’hollywoodienne Poppea de Danielle de Niese est aussi craquante que bien chantante. On comprend Néron ! Ce dernier, un travesti, est chanté par Alice Coote. Véritablement terrifiante dans toutes ses apparitions, cette artiste compose un personnage d’une rare authenticité musicale. Une merveille. A vrai dire, il faudrait citer toute la distribution, chacune et chacun étant un véritable joyau. Il en est ainsi d’Iestyn Davies, fragile et émouvant Ottone, Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, impayable Arnalta et clone à peine déguisé, dans sa dernière scène, de Sa Très Gracieuse Majesté, Tamara Mumford, Ottavia pétrie de haine, Dominique Visse, inénarrable Nutrice, Paolo Battaglia, Seneca monumental de… stoïcisme, etc…L’Orchestra of the Age of the Enlightenment sous la direction d’Emmanuelle Haïm reçoit au final une véritable ovation amplement méritée.La mise en scène de Robert Carsen, dans le sobre et rouge décor de Michael Levine, est un modèle d’intelligence et d’invention. S’il actualise ses personnages, c’est pour nous montrer avec une audace incroyable toute l’éternité de la condition humaine. Génial ! Tout simplement.