Créé le 5 février 2011 au Théâtre du Capitole, l’opéra-oratorio « L’Aire du Dire », du compositeur Pierre Jodlowski est l’objet d’un enregistrement DVD qui sort le 3 avril 2013. Cet étonnant spectacle, coproduit avec le chœur de chambre « les éléments », dirigé par Joël Suhubiette, était présenté dans le cadre du cycle « Présences vocales » par le collectif « éOle », Odyssud-Blagnac, le Théâtre du Capitole et le Théâtre Garonne de Toulouse. Lors de sa création, Pierre Jodlowski présentait ainsi son œuvre : « L’Aire du Dire, sorte d’oratorio aux multiples voix, repose… sur l’éloge de la parole ; celle qui nous structure, celle qui borne le champ conscient de la mémoire, celle qui tisse notre réseau émotionnel, nous permet d’accepter la fiction du monde. » A l’occasion de la parution du DVD du spectacle de création, le compositeur nous a en outre accordé un entretien passionnant visible sur ce site. O Structuré en 19 scènes, ce spectacle complet est écrit pour les douze chanteurs du chœur « les éléments », mais également pour un dispositif électronique et vidéo très élaboré. L’étrange et beau sujet, traité par séquences successives, évoque le rôle du discours, de la parole, dans notre vécu quotidien. A propos de cette création, j’avais écrit, sur ce même site, les éléments suivants, toujours d’actualité à propos de cette parution : « Le “livret” (pour employer un terme familier aux amateurs d’opéra) rassemble une succession de discours historiques, de prises de parole, d’évocations poétiques dont certaines sont écrites par le compositeur lui-même qui les met en musique. Cette suite est ponctuée périodiquement par une série de six poèmes en prose extraits du recueil Anachronisme de Christophe Tarkos, poète disparu en 2004, déclamés sur écran vidéo par les chanteurs de l’ensemble vocal qui se succèdent ainsi, les yeux fermés. L’évocation systématique, dans tous ces poèmes, de l’hiver dans un parc constitue comme un thème musical qui reviendrait imprimer nos mémoires d’un repère aux allures de leitmotiv. La mise en scène et surtout la mise en lumière du spectacle, toutes deux magnifiquement conçues par Christophe Bergon, confèrent toute sa force au propos de l’œuvre. La partition musicale, composée pour le chœur en direct, mais aussi pour une intervention électronique, utilise un riche vocabulaire qui ne renie pas l’héritage des grands défricheurs du 20ème siècle : Karlheinz Stockhausen et ses créations électroniques, Luciano Berio et l’utilisation de la voix étendue aux onomatopées, aux soupirs, ou même Györgi Ligeti dans son Lux Aeterna. Néanmoins, Pierre Jodlowski crée ici une œuvre d’une grande originalité par la synthèse qu’elle réalise entre ces éléments et le volet visuel du projet qui contribue stratégiquement à l’assimilation musicale. L’émotion est à son comble à l’écoute de la déclaration du chef Indien Seattle à propos du destin tragique de sa nation. Emotion soulignée par le dernier poème de Tarkos déclamé par la succession des chanteurs qui ouvrent enfin leurs yeux. La conscience s’éveillerait-elle ? Il est impossible de dissocier l’œuvre de son interprétation raffinée et de sa présentation scénique particulièrement élaborée. La clarté, la précision de la direction de Joël Suhubiette constituent même un élément visuel structurant de l’écoute. La perfection des interventions chorales est à souligner.» La captation gravée sur ce DVD est un reflet particulièrement fidèle de la création. Un bonus constitué d’entretiens avec les principaux artisans du spectacle complète judicieusement ce film habilement réalisé. A découvrir absolument !
