DVD

Pour James Levine. Et seulement !

      La parution de cette soirée du 15 décembre 1981 dans le temple lyrique américain laisse perplexe. Certes l’affiche est alléchante et l’on imagine qu’il suffit de mettre en photo Luciano Pavarotti pour s’assurer un bon succès commercial. Mais qu’en est-il en réalité ? O Bien sûr il est important de souligner que cette captation date d’il y a plus de trente ans et que, depuis, bien des choses ont changé en matière lyrique. Les échos de cette époque nous proposent quoi ? A voir ? une mise en place, je n’ose parler de mise en scène, plus que rudimentaire, évoquant plutôt des entrées et des sorties calées pour satisfaire au mieux les chanteurs dans leur souci de garder le maximum de leur énergie pour leur voix Cette production est signée John Dexter et ravira tous les tenants de l’opéra en tant qu’art muséal. A entendre ? un vétéran qui jette ses derniers feux dans une bataille qui le trouve bien en difficultés sur le final. Il s’agit du baryton québécois Louis Quilico, alors âgé de 66 ans. Si le timbre est toujours là, le style fait cruellement défaut et le Bouffon se retrouve affublé ici des pires accents véristes. Ce n’est pas une question d’âge pour Luciano Pavarotti, à 46 ans alors au faîte de son art vocal. Le timbre est parfois insolent, irremplaçable, vainqueur, éclatant. Mais en cette soirée de routine, le Duc du ténor italien n’appuie aucun grave, laisse flotter le médium, pour se concentrer sur ce qui a toujours fait sa gloire : le registre aigu, un registre que l’on a connu plus net faut-il dire. Quant à sa tenue en scène, elle rappelle celle de ses récitals… Voilà pourquoi ce ténor ne fut jamais un artiste mais une célébrité. C’est la soprano martiniquaise Christiane Eda-Pierre qui est ce soir-là Gilda. Toute proche de la cinquantaine, cette magnifique cantatrice a depuis longtemps laissé tomber les stratosphères suraigües de ses débuts et chante ici une héroïne avec cette voix devenue alors d’un velours sombre, au médium soyeux. S’abstenant du contre-mi bémol de la vengeance, la soprano manque constamment d’engagement autant scénique que vocal. Et pourtant elle dispose de la véritable tessiture de ce rôle, trop souvent attribué à des rossignols sans intérêt. Passons sur des seconds rôles limites pour en arriver au meilleur de la soirée, le jeune chef (38 ans) américain James Levine. Avec lui et l’un des meilleurs orchestres de fosse du monde, Verdi est présent, musicalement, toute la soirée. Quelle tension, quelles dynamiques, quelle vitalité ! Et surtout quels phrasés ! Déjà il était facile de deviner quel chef d’opéra il allait devenir. L’un des plus grands. Pour autant, est-ce suffisant ?

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