Les représentations de l’Aïda verdienne, spectacle d’ouverture de la saison scaligère 2006/2007, resteront dans l’histoire comme l’un des plus fumeux scandales lyriques du 20ème siècle, le ténor Roberto Alagna quittant la scène dès la fin de son air d’entrée suite à un mouvement d’hostilité du public à son encontre. Fort heureusement, le geste d’humeur du franco-sicilien se produisit lors de la seconde représentation, ce qui permit à DECCA de capter sans problème le soir de la première. La voici dans le présent dvd, agrémentée de quelques fragments captés lors de la générale. Vingt ans après sa dernière apparition dans le temple lyrique, le metteur en scène Franco Zeffirelli nous donne à voir une Aïda overdosée de hiéroglyphes, plus proche des péplums des années 60 que d’un travail dramaturgique visant à mettre en valeur le conflit amoureux opposant deux princesses et un jeune guerrier. Soit. Sur le plateau, et si l’on excepte le piètre Amonasro de Carlo Guelfi, la distribution tient la distance, en particulier l’Aïda formidablement chantante de Violeta Urmana et la volcanique Amnéris d’Ildiko Komlosi. Demeure le cas Alagna, vraiment pas à l’aise dans le rôle de Radames, un emploi qui l’oblige à des compromissions vocales qui pourraient lui coûter cher. Etrangement absent dramatiquement, celui qui fut un fabuleux Roméo se transformait ici en interprète d’une banalité accablante. Autant dire qu’il était facile alors à Riccardo Chailly de cueillir les lauriers de la gloire à la tête de phalanges milanaises hors de portée dans leur arbre généalogique. Le maestro hisse cet enregistrement, musicalement parlant, en haut du classement. Ce qui, compte tenu de la concurrence, n’est pas rien.
