Paul-Arnaud Péjouan-Cassanelli, fondateur et co-directeur du Festival International Piano aux Jacobins, mène également une belle carrière dans le domaine des arts plastiques. Un domaine qu’il ne peut évidemment pas déconnecter de la musique qui lui est si chère. Sous le nom d’Axel Arno, il utilise ses dons de photographe pour concevoir des œuvres colorées d’une étrange beauté. La parution de ce DVD célèbre le mariage heureux du visuel et de l’espace sonore et musical. O Qui mieux que Bach le grand, inventeur de formes et de structures maîtrisées du temps musical, pouvait trouver une équivalence visuelle aussi harmonieuse ? Outre cette participation posthume du fondateur de notre musique occidentale, l’OMNI (Objet Musical Non Identifié) que constitue ce DVD bénéficie de la conjonction de trois talents complémentaires : celui d’Axel Arno, auteur des images chargées d’évocation, celui du pianiste de jazz et compositeur Edouard Ferlet, qui puise son inspiration dans l’œuvre de Bach, enfin celui de Maurice Salaün, réalisateur du « morphing » qui anime les images initialement fixes du plasticien. Sous le titre Métamorphose Bach, cette parution sollicite autant l’œil que l’oreille. La bande-son de cet étrange film résonne comme une évocation respectueuse et inspirée de l’œuvre de Bach jouée et transcrite au piano par Edouard Ferlet dont l’imagination n’a pas de limite. Des extraits du Clavier bien tempéré, des Suites pour violoncelle seul, des Suites pour luth, des Suites françaises, des Variations Goldberg et des Suites pour orchestre alimentent l’inspiration jazz du pianiste.L’œil est alors sollicité par un déploiement de couleurs et de formes changeantes qui accompagnent, sans redondance aucune, l’évolution de la musique. Le rythme y joue un rôle prépondérant. Les innombrables photos à l’origine de cette fresque mouvante ont toutes été réalisées de nuit en Chine et n’ont subi aucun traitement autre que le morphing qui leur confère le mouvement. L’expérience hypnotique fascine autant qu’elle apaise.Comment ne pas évoquer Baudelaire et son poème Correspondance qui définit ces rapports subtils entre les sens qui nous relient au monde extérieur : « Les parfums, les couleurs et les sons se répondent. » ? D’autres compositeurs ont évoqué ce lien subtil qui associe à la musique la vision de formes et de couleurs. Alexandre Scriabine avait conçu un clavier à lumière pour accompagner son Poème du feu. Olivier Messiaen évoquait souvent la « synesthésie » dont il était affecté. Une particularité qui lui permettait de « voir » des manifestations colorées précises à l’écoute des divers accords musicaux dont chacun produisait ses propres visions.Voici donc une parution en forme d’expérience nouvelle qui mérite largement le détour du mélomane.