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Le rôle des rôles

        Lorsqu’une génération de sopranos compte une interprète authentique de Norma, elle peut s’estimer, et nous avec, comme comblée. Pour être clair et net, le dernier quart du siècle passé fut dominé, pour ce rôle,  par Montserrat Caballé. Après le soprano catalan, quelques autres tentèrent l’expérience du rôle des rôles. La dernière en date est la slovaque Edita Gruberova. Aujourd’hui au crépuscule d’une flamboyante carrière qui fit d’elle une exceptionnelle Reine de la Nuit, tout comme une Zerbinette historique au même titre que sa Lucia et sa Constance, la cantatrice se mesure donc à Norma, un rôle dans lequel elle déploie toute une technique acquise en quarante années d’une vie professionnelle foisonnante.Dans un emploi italien, le premier handicap de cette artiste est certainement une émission très particulière, une émission dans laquelle certaines attaques non vibrées peuvent, à juste titre, irriter des oreilles habituées à des rondeurs différentes. Si l’on s’accommode malgré tout de ce particularisme, ainsi que d’un jeu un rien daté,  alors il convient de considérer l’interprétation de la Gruberova comme l’une des plus idoines qui puisse être entendue aujourd’hui. Hésitant devant un poitrinage trop envahissant, elle privilégie un medium et une tierce aigue dans lesquels elle accomplit de pure merveille de legato, de nuance et de musicalité.A ses côtés, Sonia Ganassi se révèle une Adalgisa au timbre sensuel, particulièrement émouvante et superbement chantée. Le Pollione de Zoran Todorovich, outre un engagement total, alterne avec bonheur vaillance et lyrisme du meilleur aloi. Roberto Scandiuzzi est l’Oroveso majestueux et douloureux que l’on peut imaginer.Les phalanges de l’Opéra d’Etat de Bavière (Munich), sous la direction de Friedrich Haider, accompagnent – trop –  simplement un spectacle signé entièrement Jürgen Rose, un spectacle confus navigant entre lance et fusil mitrailleur, confus mais finalement captivant par la vision des deux mondes qu’habite Norma, celui, souterrain, dans lequel la mère qu’elle est vit les affres d’une rupture affective, et le monde d’en haut où la prêtresse qu’elle devient alors domine un peuple jusqu’à le manipuler.Peut-être pas l’enregistrement vidéo du siècle, certes, mais tout de même…

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