DVD

La magie d’un spectacle

      Composé entre Anna Bolena et Roberto Devereux, Maria Stuarda fait donc partie de cette trilogie des reines donizettiennes ressuscitées par Maria Callas, Joan Sutherland, Beverly Sills, Leyla Gencer et Montserrat Caballé. Ces rôles, d’une difficulté vocale et dramatique majeure, sont l’apanage d’une poignée de cantatrices par siècle. A-t-on aujourd’hui les carrures nécessaires, sur tous les plans, pour rendre justice à ces partitions créées par des légendes de l’art lyrique : Giuditta Pasta, Maria Malibran et Giuseppina Ronzi De Begnis ? O Anna Netrebko (voir Anna Bolena) est certainement celle dont les moyens musicaux, si ce n’est la vocalité, s’approcheraient au plus près de pareilles exigences de phrasé, de legato, de style, d’ambitus. La mezzo Joyce Di Donato (Maria Stuarda) se lance dans ce rôle de soprano lirico-spinto de manière, à l’évidence, trop téméraire. Quelques enregistrements récents nous dévoilaient un grave en perdition et un vibrato qui commençait à devenir encombrant. Confirmation hélas avec cette prise en direct sur la scène du MET du 19 janvier 2013. Alors, bien sûr, il est hors de question de passer sous silence l’immense styliste et musicienne qu’est cette Américaine, de même que la prodigieuse tragédienne incarnant ici à merveille cette reine vouée à la mort par ses trahisons et le sang qui ruisselle de ses mains. Saluons au passage l’excellente prise de vue qui permet de côtoyer au plus près les intentions des chanteurs. Mais sans la magie de l’image, quelle serait notre réaction… ? A ses côtés, la soprano Elza van den Heever incarne une Elisabetta formidablement engagée, aux attitudes scéniques très masculines (?) mais vocalement assez au fait de sa partition, d’ailleurs habituellement distribuée aujourd’hui à une mezzo…  Matthew Polenzani en Robert n’a jamais fait rêver personne et les seconds rôles sont de bon niveau pour le MET. La production, signée David McVicar, tient plus de la mise en place scrupuleuse, ce qui n’est déjà pas si mal, que d’une lecture approfondie, voire novatrice, de l’ouvrage. Mais peut-il en être autrement ? Les costumes somptueux s’inscrivent dans des décors simplissimes mais chargés de symbolique en termes de couleurs. Un dernier mot pour dire combien Maurizio Benini dirige ce spectacle d’une battue carrée laissant peu de place musicale à l’émotion. Mais finalement, le professionnalisme, malgré tout, de la distribution, chœurs inclus, et le coup d’œil avisé du cameraman (j’y reviens !) sauvent le tout et gomment bien des imperfections coupables.

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