DVD

Faust – Charles Gounod – Royal Opera House

      Et tout d’abord, rendons à David McVicar ce qui lui revient, c’est-à-dire la paternité de cette production. En effet, absent de la jaquette de ce DVD comme de la plaquette intérieure qui l’accompagne, son nom ne figure qu’à l’extrême fin du générique ! Ceci étant dit, le présent DVD nous ramène quelques six années en arrière, au Royal Opera House de Londres, pour une soirée qui fit alors grand bruit. C’était le 19 juin 2004. Sur scène, une poignée de stars ; à la production, un Ecossais surdoué qui a pour habitude de secouer sérieusement les ouvrages qui lui sont proposés.   Avec ce Faust de Gounod, il y avait tout à craindre pour notre petit confort. Et effectivement… McVicar rend en quelque sorte un hommage à cet opéra du 19ème siècle qui fit les beaux soirs du Palais Garnier, dont la salle d’ailleurs figure en toile de fond dans cette production. Mais un hommage à sa manière, iconoclaste et sale gosse, transformant Méphisto en drôle de mousquetaire ou encore en drag queen monstrueuse. Faust se contente, si l’on peut dire, d’être à la fois ivrogne et cocaïnomane. Quant à la scène du bal, ici au Cabaret de l’Enfer, elle n’a rien à envier à la Nuit de Walpurgis, avec ballet complet s’il vous plaît, où l’on voit une pseudo Giselle en tutu manquer d’accoucher sur scène ! L’orgie qui suit n’étonne plus personne. Bon, et dans tout cela, quoi de neuf ? A vrai dire, pas grand-chose car nombre de faits et gestes ont déjà été vus, que ce soit chez Lavelli, Joel, Carsen ou encore Russell. Cela dit, ce Faust un peu brouillon scéniquement, fonctionne tout de même assez bien. Ne boudons pas notre plaisir. Côté distribution, que du beau monde. Sous la direction attentive d’Antonio Pappano, les excellents chœurs du ROH et un quintette quasi inattaquable nous donne à entendre ce qu’il se faisait alors de mieux. L’éblouissement à la lecture de la distribution une fois passée, force est de constater combien le couple Alagna/Gheorghiu fonctionne. Le ténor chante cette partition plus meurtrière qu’il n’y paraît  avec un phrasé et un éclat uniques. Roberto Alagna est incontestablement un Faust d’anthologie. Angela Gheorghiu lui donne, dans Marguerite, une réplique sans faille même si elle semble, en particulier dans le trio final, sur sa limite. Mais quelle musicalité, quelle élégance ! Que dire également du Siebel de Sophie Koch si ce n’est souligner le luxe d’une telle artiste dans cet emploi. C’est par la suite que les réserves apparaissent. Simon Keenlyside est-il un Valentin crédible ? Scéniquement bien sûr car le talent de tragédien de ce baryton assure une grande partie de son succès, quels que soient les rôles qu’il aborde. Vocalement, sa tendance à nasaliser certains sons finit par endommager la couleur de cette voix qui, de plus, n’est pas gigantesque. Or, ce rôle exige une projection percutante sur l’ensemble d’une tessiture dont l’ambitus est largement sollicité. Mais c’est avec Méphisto que le bât blesse véritablement. Malgré toutes les qualités vocales de Bryn Terfel, il ne sera jamais la basse chantante réclamée pour ce rôle. Plusieurs passages dans le bas medium et le grave le mettent en péril. Qui plus est, et même si sa prestation est loin d’être déshonorante, c’est une question de couleur. Diable issu tout droit d’un mauvais Boulevard du crime, le baryton-basse gallois ne convainc pas totalement. En conclusion, un DVD a priori flamboyant, important pour le couple vedette, mais sur lequel il n’est pas interdit de porter un regard nuancé au vue de la production et des deux clés de fa.

Partager