DVD

Distribution de “légendes”

En hommage à la cantatrice américaine Shirley Verrett, disparue l’an passé, DECCA publie aujourd’hui une représentation de Tosca captée sur le vif en 1978 au MET de New York, sous la direction d’un tout jeune et déjà talentueux chef de 28 ans, James Conlon. C’est un vétéran de l’art lyrique qui se voyait confier la mise en scène. Et quel vétéran ! Rien moins que le Scarpia qui affronta Callas : Tito Gobbi. Fort des 870 incarnations de l’infâme Baron qu’il avait à son actif, le célèbre baryton italien donne ici une lecture parfaitement traditionnelle de cet ouvrage, laissant les chanteurs s’exprimer vocalement à loisir. Il faut dire que son cast regroupait alors trois artistes entrés depuis dans la légende de l’opéra. Tenons-nous pour autant le DVD du siècle concernant cet ouvrage ? Rien n’est moins sûr.   Shirley Verrett fit une carrière somptueuse de mezzo et se tourna, de temps en temps, vers des rôles de Falcon, de soprano dramatique. Avec plus ou moins de bonheur faut-il reconnaître. Si l’on admire ici la plastique de cette cantatrice, le grain d’une voix au timbre ensorcelant, le phrasé qui trahit voluptueusement la  fréquentation des répertoires  verdien et bellinien, la musicalité toujours présente, il faut aussi souligner hélas les difficultés dans le registre aigu et le manque de projection dans le haut médium, signe infaillible d’une voix étirée. DECCA a certainement bien d’autres témoignages plus incontestables de l’art de Shirley Verrett. A ses côtés, LE ténorissime himself au faîte de ses moyens (il a 43 ans alors) : Luciano Pavarotti. C’est un véritable récital (à tous les sens du terme d’ailleurs…). La voix est imposante, magnifique, formidablement homogène, le timbre est littéralement incandescent, beaucoup plus que le musicien et le comédien, devons-nous reconnaître. En effet, il faut attendre l’extrême fin de l’opéra pour que Big Luciano nous gratifie de quelques nuances dans son chant. Dommage.C’est un véritable pensionnaire du MET qui était ici Scarpia : Cornell MacNeil. Lorsqu’il fit ses adieux à la scène, il avait 65 ans, neuf ans avant la présente captation, il interpréta alors Scarpia in loco pour la quatre-vingt douzième fois ! Titulaire de tous les grands rôles de baryton verdien sur cette scène, il mena une carrière d’une longueur exceptionnelle. Même s’il n’a jamais pu faire oublier Warren ou Cappuccilli, Cornell MacNeil s’est toujours montré un interprète d’une parfaite probité, tant musicale que scénique. Ce qui est encore le cas lors de cette représentation en termes de présence  et de vocalité.Les seconds rôles sont parfaits, particulièrement le Sacristain luxueux de Fernando Corena, comprimario titulaire d‘une infinité de rôles au MET.

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