Disques

Les concertos pour deux, trois et quatre claviers de Johann Sebastian Bach

Bach reste l’un des premiers compositeurs de l’Histoire à consacrer des concertos au clavier, en l’occurrence au clavecin, le clavier le plus utilisé à l’époque avec l’orgue. A Leipzig, vers 1730, il se lance dans l’écriture de quatorze concertos avec accompagnement de cordes : huit pour un clavecin, trois pour deux clavecins, deux pour trois clavecins et un pour quatre clavecins.
Le programme de cette nouvelle parution discographique (sortie le 16 novembre prochain) réunit les trois concertos pour deux claviers, l’un des concertos pour trois claviers et le concerto pour quatre claviers de Johann Sebastian Bach. Suivant une tradition bien établie, le piano se substitue ici au clavecin. Le maître d’œuvre de cette sélection, David Fray n’en est pas à sa première incursion dans le monde du clavier tel que Bach l’explore et le révèle. En 2008, il a réalisé un DVD et un CD qui rendent compte de l’approche mise en œuvre par le jeune pianiste (il a alors 27 ans) qui endosse déjà la double responsabilité de la partie soliste et de la direction de l’accompagnement orchestral. Il étend cette fois son action musicale aux concertos pour plusieurs claviers.

Il a fait appel ici à trois de ses collègues pour compléter le quatuor des solistes : Jacques Rouvier, son professeur, grand pédagogue et musicien ainsi que deux pianistes de sa propre génération, Audrey Vigoureux, née à Aix-en-Provence en 1981, établie à Genève, et Emmanuel Christien qui a intégré la classe de Jacques Rouvier au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris en 1999. C’est à l’ensemble à cordes de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse que David Fray a fait appel pour accompagner ces cinq partitions.

Ce même ensemble et ces mêmes solistes animent en outre, le 23 novembre 2018 à la Halle aux Grains de Toulouse, un concert caritatif organisé par le Rotary Club au bénéfice de la recherche en cancérologie (réservations sur https://david-fray-rotary.festik.net/). L’enregistrement de ce programme a même eu lieu dans la très belle chapelle des Carmélites de la Ville rose que les Toulousains connaissent bien.

Le Concerto pour deux pianos BWV 1060 a comme origine le concerto pour violon et hautbois du même Bach. Le BWV 1061, également pour deux pianos, est vraisemblablement la transcription d’une œuvre pour deux clavecins, sans accompagnement. Le Concerto pour deux claviers BWV 1062 dérive du célèbre concerto pour deux violons BWV 1043. Le Concerto pour trois pianos BWV 1063 pourrait bien être la transcription d’un original pour violon, hautbois et flûte, peut-être même d’un autre compositeur que Bach. Enfin, le Concerto pour quatre pianos BWV 1065 est une transcription du Concerto pour quatre violons R 580, d’Antonio Vivaldi.

Comme le formule le musicologue Rémy Stricker dans le livret de cet album : « Faut-il jouer [ces concertos] sur des pianos modernes ? » La réponse se trouve dans la tradition historique de l’exécution des œuvres de musique baroque. Bach ayant lui-même transcrit ses propres œuvres et celles de ses contemporains pour d’autres instruments que les originaux, pourquoi se priverait-on aujourd’hui de telles pratiques ?

Les quatre pianistes de cette parution se relaient dans les rôles de solistes et fusionnent leurs talents dans la ferveur commune dont témoignent ces interprétations. David Fray mène ses collègues et les musiciens des pupitres de cordes de l’Orchestre national du Capitole avec une énergie mesurée et un sens aigu de la danse et de la polyphonie. Bach éternel défie les siècles.

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