Danse | DVD

La Grande Boutique côté tutus

Loris Freeman (Jonas) et Ariane Labed (Zoé) - photo Victoria Production (Newen France)

Le surnom aussi perfide qu’ironique de Grande Boutique dont Giuseppe Verdi affuble l’Opéra national de Paris au XIXe siècle est, semble-t-il, plus de cent après toujours d‘actualité.

Dans la fiction créée par Cécile Ducrocq et Benjamin Adam, réalisée notamment par Stéphane Demoustier, nous voilà plongés au cœur de ladite Boutique versant tutus et pourpoints.

Nous faisons connaissance avec Zoé, Etoile, grade suprême obtenu grâce à son talent. Mais voilà, Zoé mène une vie pour le moins dissolue, collectionnant les amants et les nuits qui vont avec, les soirées arrosées, etc. Son niveau n’est plus compatible avec celui d’une Etoile. Le licenciement se faufile sous les lambris dorés du Palais Garnier.  En même temps, Flora, jeune danseuse noire, est admise comme surnuméraire dans le Corps de ballet.  Mais comme les chose ne sont jamais simples, surtout ici, c’est le moment que choisit Nadia, la Patronne de la Boutique, pour licencier le Directeur de la danse, Sébastien. Un intérim se met en place et voit l’arrivée aux commandes de Diane, ancienne professeur plus que redoutée de l’Ecole de Danse de Nanterre, pouponnière de la quasi intégralité des danseurs de l’Opéra national de Paris.  Arrêtons-là car ce ne serait pas charitable d’aller plus avant dans les méandres d’un scénario qui, sur ces deux premières saisons, nous immerge dans le milieu draconien et a priori terrifiant de la danse.  Il faut le répéter, il s’agit ici d’une fiction. Tout en reconnaissant que des éléments tout ce qu’il y a de plus réels et ressemblants de manière troublante se sont produits dans cette Institution ces dernières années… Bref.  C’est une série, avec ses codes, ses cases parfaitement cochées, ses interprètes peu connus ou célèbres. Au rang de ces derniers : Raphaël Personnaz, magnétique Directeur de la danse, Ariane Labed, stupéfiante Zoé, Anne Alvaro, Diane totalement castratrice, etc.  Si tout n’est pas estampillé « histoire vraie », par contre la documentation sociale, psychique, technique, relationnelle, artistique qui sous-tend le scénario est délirante… d’authenticité.

En creux se dessinent ici des sujets pris à bras le corps par le  -vrai-  nouveau Directeur de cette Maison qui compte parmi les cinq plus prestigieuses du monde : le harcèlement et la « couleur ». Sur ce dernier point, Flora doit se battre dès le début pour pouvoir apparaître sur scène malgré un talent évident. 

Suzy Bemba (Zoé) et Adrien Dewitte (Valentin) – Photo Victoria Production (Newen France)

La série pointe aussi du doigt les lourdeurs administratives toujours aussi prégnantes plus d’un siècle après avoir épuisé le compositeur de Rigoletto. A ce titre, le personnage de Tiphaine (Sarah Le Picard) est un régal. C’est à elle qu’il appartient de régler les caprices de tout ce petit monde. Son poste de Secrétaire du Directeur de la danse est un véritable brûlot de toutes les incohérences d’un système à bout de souffle. Qu’on se le dise, ce système a tout de même porté sur la plus haute marche du podium mondial le Ballet de l’Opéra national de Paris.  Mais rien n’est éternel, les temps changent, le monde avec et ce qui était admissible hier…

Entre actualité et fiction, deux saisons passionnantes !

Robert Pénavayre

« L’Opéra » CINEFEEL –  Coffret 4 dvds –

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