Danse

Giselle, toujours recommencée et parfois… différente…

Giselle est le ballet romantique par excellence, emblématique de ces ballets blancs qui vont transformer, au XVIIIe siècle, les danseuses en personnages éthérés enveloppés d’un nuage de tulle et s’élevant dans les airs grâce à d’audacieuses machineries, sans oublier ce petit chausson qui va leur donner cette élévation si particulière à la danse classique. Cette œuvre au répertoire de toutes les Compagnies classiques depuis sa création en 1841, est certainement l’une des plus dansées au monde et toutes les danseuses ont rêvé un jour de l’interpréter, car au-delà de la chorégraphie il s’agit d’un véritable rôle dramatique demandant de réels dons de comédienne.

María Gutiérrez et Kasbek Akhmedyarov dans Giselle

(Photo David Herrero)

Pour ce début de saison Nanette Glushak avait choisi ce ballet pour deux seules et uniques représentations au Casino Barrière, partenaire fidèle des spectacles de ballet. C’est à partir des chorégraphies de Jules Perrot et Jean Coralli en 1841 et celle de Marius Petipa en 1887, que la Directrice de la Danse construit sa « Giselle ». Bien que vue et revue, l’histoire de cette petite paysanne obsédée par la danse et succombant au charme trompeur du trop beau Loys/Albrecht nous émeut toujours autant au fil des représentations. C’est María Gutiérrez et Kasbek Akhmedyarov qui assuraient la première distribution. María dans le premier acte est toujours aussi spontanée, naïve et éblouie par son tout nouveau bonheur. Dans le deuxième acte, elle est un modèle de légèreté et d’irréalité. A ses côtés Kasbek démontre une nouvelle fois sa technique assurée et son interprétation dramatique qui s’affine de ballet en ballet.

Pourtant, nous n’avons pas retrouvé cet état de grâce absolue d’avril 2010. Quelques approximations, des maladresses que n’ont pas fait oublier les arabesques parfaites de María, ou la magnifique série d’entrechats de Kasbek qui ont enthousiasmé la salle. Il manquait un je ne sais quoi pour rendre la magie de cette œuvre. Même la superbe Juliana Bastos nous a campé une Myrtha manquant parfois de souplesse dans les bras, et manquant de cette autorité qui nous avait enchantés lors de la précédente production de Giselle.

Alors, quelle raison peut-on invoquer ? Est-il possible que ce ballet arrive très tôt, trop tôt dans la saison ? Car « Giselle » est un ballet très exigeant tant techniquement que dramatiquement. Mais que l’on ne s’y trompe pas, habitués à l’excellence nous pouvons peut-être nous montrer trop exigeants. D’autant que la tenue générale du spectacle fut très bonne. Nous n’en voulons pour preuve que le superbe « Pas des vendangeurs » qu’interprétèrent, ô combien brillamment, Magali Guerry et Davit Galstyan toujours égaux à eux-mêmes, ainsi que l’Hilarion de Henrik Victorin, ou l’interprétation sensible de Marina Laffargue dans le rôle essentiellement théâtral de Berthe, la mère de Giselle.

Magali Guerry et Davit Galstyan (Photo David Herrero)

Le corps de ballet, dans le deuxième acte en particulier, fut (malgré le nombre réduit de danseuses par rapport à ce que demande l’œuvre) à la hauteur de ce que l’on peut attendre de notre Compagnie. Nous n’avons pas eu la possibilité de voir la deuxième distribution, mais des avis très autorisés nous ont fait regretter notre absence, nous décrivant avec des termes plus que flatteurs la « Giselle » de Tatyana Ten, issue du corps de ballet où elle est arrivée l’an dernier. Et c’est là une des grandes qualités de Nanette Glushak qui sait reconnaître au premier coup d’œil le germe du talent chez les jeunes danseurs, et surtout leur donner la possibilité de démontrer sur scène ce qu’ils sont capables de faire. Saluons encore la nomination de Takafumi Watanabe comme soliste, ce qui couronne une magnifique saison 2010-2011.

Juliana Bastos et le corps de ballet (Photo David Herrero)

Nombreux sont les nouveaux arrivants dans le corps de ballet, venant d’horizons très différents : Etats-Unis, Russie, Allemagne, mais aussi tout simplement Toulouse avec, par exemple, Solène Monnereau qui nous arrive du VMDance Studio, ce qui nous démontre l’attention que porte Nanette Glushak à ce qui se passe dans sa propre ville. Cette nouvelle saison plus riche en spectacles nous permettra certainement de constater une nouvelle fois que son « flair » ne se dément pas.

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